
• Un style intact
• trop de "c'était mieux avant"
L’asile psychiatrique de Normal Head recueille un seul type de personnes : les veilleurs stratégiques civils et militaires en dépression. Le soir même de l’arrivée d’Adam Dearden dans l’hôpital, un des pensionnaires se volatilise. À la place de son corps, on retrouve un amas d’insectes. Cet évènement va provoquer l’effervescence dans l’établissement. Tous les patients mèneront l’enquête pour trouver les raisons de cette mystérieuse disparition.
Un nouveau projet de Warren Ellis a toujours tendance à soulever l’intérêt. Scénariste de comics reconnu, on lui doit des œuvres cultes comme Transmetropolitan, The Authority ou plus récemment Trees publié chez Image. Il abandonne un temps la bande dessinée pour la littérature. Normal est son troisième roman. On retrouve dans ce livre le ton qui fait le charme de cet auteur, mais il n’atteint pas la grâce du récit mettant en scène Spider Jerusalem.
Des personnages fascinants
La disparition mystérieuse du pensionnaire de Normal Head arrive très vite dans le livre. L’incident est suffisamment surprenant et énigmatique pour attirer tout de suite l’attention du lecteur. À la suite de cet événement perturbateur, Warren Ellis dévoilera une galerie d'individus truculents. Son histoire met en scène des futurologues qui sont chargés de faire des prévisions sur les dérèglements climatiques ou sur l’effondrement des nations, par exemple. L’auteur, dans une interview à propos du livre raconte qu’il avait rencontré beaucoup d’entre eux. Il explique que ces personnes ont besoin d’une bouteille de Prozac pour dormir, parce qu’il est éreintant de considérer le pire scénario pour chaque chose. L’écrivain aborde leur affliction sans tomber dans le misérabilisme. En creux de son histoire, cela lui permet de traiter un certain nombre des maux futurs qui pourraient frapper l’humanité.
Climax qui fait pschiiiit !
Le récit s’égraine entre ces rencontres. Jusqu’à ce qu’une course contre la montre se lance. Toutes les pièces du scénario commencent à se mettre en branle. La tension est à son paroxysme. Et… pschit ! Warren Ellis désamorce totalement le climax. L’action promise ne viendra jamais et ne sera pas remplacée par un twist surprenant. Il place simplement une ellipse et saute au dénouement. Le final s’ouvre sur un dialogue qui permet à l’auteur d’expliquer le traumatisme initial qui a conduit le héros à l’asile. L'analepse éclaire évidemment les évènements qui se sont produits dans l’hôpital psychiatrique, mais la conclusion se contente de bauger dans le pessimisme.
S'il est loin d’être mauvais, difficile de s’enthousiasmer pleinement pour ce roman. Normal met en scène des personnages fascinants au cœur d’une intrigue dont la promesse de départ ne s’avérera qu’un écran de fumée. Ce livre se résume à conforter la neurasthénie ambiante, et promouvoir l’adage éculé du « c’était mieux avant », sans aller au-delà.