
• Le contexte africain
Une guerre ethnique ensanglante un pays africain. Une femme survit au massacre de son village et au viol qu’elle a subi par un général ennemi. N’ayant plus d’endroits où aller, elle erre dans le désert où elle donnera naissance à une enfant à la peau et aux cheveux couleur de sable. Elle comprend que sa fille est spéciale, elle lui donnera l’étrange prénom Onyesonwu, qui veut dire :Qui a peur de la mort ? L’enfant va grandir dans les préjugés qui entourent sa naissance. Elle est qualifiée d’Ewu. Dans l’idée commune, ces enfants portent en eux la violence qui les a fait naître. On considère qu’ils sont condamnés à reproduire cette violence.
Mais Onyesonwu va s’affirmer comme une fille particulière. Elle possède de puissants pouvoirs magiques qui s’accroîtront au fur et à mesure de l’âge. Mais elle découvre qu’un être en veut à sa vie : son père biologique. Sa nature rebelle la pousse à quitter la sécurité de son village afin d’affronter son destin.
Si la trame du récit emprunte beaucoup d’éléments de la fantasy classique, il existe une différence fondamentale avec les œuvres du même genre : le récit enfouit ses racines en Afrique et non en Europe médiévale comme dans beaucoup de récits de fantasy qui se sont cristallisés après les écrits de Tolkien. Pour autant, Nnedi Okorafor nous parle de la culture africaine, sans l’inscrire dans une réalité contextuelle concrète. Elle utilise le merveilleux et les artifices propres à ce genre afin de recréer une Afrique fantasmée comme terrain de jeu de son histoire.
Nnedi Okorafor construit un monde sans concessions. Elle aborde les luttes ethniques et ses conséquences, sans le moindre fard. Pourtant elle ne sclérose pas son récit dans un univers sans lumière. Son phare principal est Onyesonwu. Elle est une héroïne forte qui refuse de plier face à la fatalité. Sa détermination donne à ce livre sa dynamique. On s’accroche à ce personnage, car l’écrivaine lui offre des moments de calme où on la voit se construire en tant que femme. On comprend ses errements, ses folies, ses passions et les peurs qui la traversent. En tant que lecteur, on entre totalement en empathie avec elle.
Si on peut reprocher quelques soubresauts légers dans le rythme de l’intrigue, pas à seul instant on a envie de fermer ce livre. Couronné en 2011 par le World Fantasy Award, Qui a peur de la mort ? est l’une des œuvres majeures du genre de ces dernières années. Au regard de ses qualités, il est compréhensible que la télévision (via George Martin) se soit précipitée pour chercher à l’adapter. Il possède tous les ingrédients d’une histoire marquante qui ne peut laisser indifférente.