
On a aimé
• La narration de la franchise
• Joue bien avec ses outils
• Une ambiance assez travaillée
• Joue bien avec ses outils
• Une ambiance assez travaillée
On n'a pas aimé
• Pas mal de facilités
• On ne ressent pas toujours les enjeux
• Une fin un peu confuse
• On ne ressent pas toujours les enjeux
• Une fin un peu confuse
Qu'est-ce qui est plus fort qu'un sleeper hit sorti il y a 10 ans ? Une suite surprise bricolée sur les restes d'un film condamné à l'oubli ! Mais qu'est-ce qui est plus fort qu'une suite inattendue ? Une suite attendue qui débarque tout de suite, nous répondait hier Netflix en assumant la paternité de la franchise Cloverfield, qui revenait juste après le superbowl grâce à The Cloverfield Paradox.
Cette fois, point n'est question de monstres attaquant une ville ou d'abris nucléaires contenant leur propre gamme de personnages monstrueux. Nous partons dans l'espace, à bord de la station Cloverfield (forcément), qui contient sa petite équipe d'astronautes et de scientifiques chargés de résoudre la crise énergétique mondiale à l'aide d'un accélérateur de particules dernier cri. Et comme ceux qui sont installés sur notre belle planète, l'instrument sera forcément l'objet de fantasmes et d'une paranoïa certaine, qui donnent au film de Julius Onah une matière très intéressante à travailler.
La patte à J.J.
Et pour son premier long-métrage, le bougre s'en sort avec les honneurs, installant très vite une ambiance pesante dans les couloirs de sa station. On regrette qu'elle soit filmée à la manière de J.J.Abrams, toujours associé au film en tant que producteur, mais le résultat est là. : le travail sur la lumière, le mouvement permanent de la station et celui de son équipage génèrent une vraie inertie, qui finit par peser sur le spectateur et le pousse à se questionner sur les véritables intentions des personnages à bord.

Des techniques assez simples, tout comme la caractérisation des protagonistes, qui s'appuie sur un maximum d'archétypes pour gagner du temps et jouer avec les outils mis à la disposition de l'intrigue. Un petit peu dommage pour l'originalité, mais The Cloverfield Paradox se rattrape avec un maximum de petites idées permises par la promesse de base et son accélérateur de particules. Le tout donne naissance à quelques scènes qui font froid dans le dos - sans verser dans l'horreur la plus pure cependant - ou repoussent les codes de la science-fiction hollywoodienne avec des concepts qui viennent plus volontiers de la littérature de l'imaginaire ou des comics.
La mystery box
Et si The Cloverfield Paradox s'avère plutôt agréable à l'œil, on le retiendra surtout pour sa narration, qui permet à la franchise lancée par Bad Robot et Matt Reeves il y a dix ans de cela de gagner en ampleur. Outre l'intrigue principale, on suivra ainsi un maximum d'indices que les fans de Cloverfield ont appris à remarquer, et qui nous mettent l'eau à la bouche pour le quatrième opus de la saga, déjà filmé. Gardez les yeux bien ouverts donc, car le film rattrape ses nombreuses facilités scénaristiques par une sorte de méta-narration (ou une sur-narration à défaut d'un terme plus approprié) assez savoureuse, qui évoque elle aussi les habitudes de ce bon J.J.Abrams, définitivement roi du storytelling cryptique. On ouvre ainsi la fameuse "boîte mystère" du réalisateur du Réveil de la Force, un sacrilège qui contre toute attente, s'avère très satisfaisant, pour la simple et bonne raison qu'il apporte plus de questions que de réponses.

Est-ce suffisant pour passer un bon moment ? Si on s'intéresse à l'écriture, sans doute. Mais les indices et les rebondissements du film de Julius Onah ne le rendent pas impardonnable pour autant. S’essoufflant dans un dernier acte un peu confus où les personnages disparaissent dans les faits ou par manque d'attention, The Cloverfield Paradox aurait gagné à soigner son final, qui hésite entre grand spectacle et résolution intimiste. Il faut dire que tout le film oscille entre les deux approches, mais ne parvient pas à incarner les enjeux énormes qui pèsent sur ses épaules (malgré un casting plutôt talentueux) comme il n'ose pas aller plus loin encore dans ses concepts les plus délirants ou les plus inquiétants.
Prise entre l'attraction d'enjeux énormes, qui pourraient être traités par un casting varié et de qualité (Gugu Mbatha-Raw, Daniel Brühl) et la gravité de concepts assez nouveaux pour surprendre, mais pas assez radicaux pour frapper, la station Cloverfield trouve un certain équilibre. Celui d'une moyenne production de Science-Fiction qui tente et essaie timidement, mais avec une certaine sincérité. Visuellement réussi, The Cloverfield Paradox aurait dû soigner son scénario avant de se soucier de la narration globale de la licence, mais à défaut, il nous propose une virée très agréable dans l'espace, qui devrait satisfaire tous les fouineurs et amateurs de theory crafting. Un résultat appréciable qui attérit au milieu de ce qui pourrait devenir un véritable eden créatif pour les réalisateurs de demain.