
• Une évolution et une alchimie maîtrisées des personnages
• De la hard science-fiction bien ficelée
• Un style d’écriture parfois maladroit
• Des éléments d’intrigue quelque peu convenus
• La fin, un peu précipitée
Des dizaines de millions d’années dans le futur, le système solaire a connu de nombreuses occupations, humaines et extra-terrestres, qui ont toutes laissé derrière elles les marques de leur passage. Nombreux sont les équipages qui s’aventurent dans l’espace à la recherche des trésors de technologie et des richesses confinées dans les entrailles de petits mondes protégés par des champs d’énergie : les écrins. Adrana et Fura Ness, deux sœurs intrépides mais inexpérimentées se lancent dans cette aventure avec l’espoir de combler les dettes de leur père.
Fort du succès de son Cycle des Inhibiteurs, l'auteur britannique Alastair Reynolds signe une nouvelle œuvre de hard science-fiction, Vengeresse, qui mêle aventure, technologie, univers intrigant et cohérent et personnages hauts en couleur.
Comme un os
Dans l’univers de Vengeresse, les os sont capables d’émettre et de recevoir des messages, sous la forme d’intentions et d’énergie que seules certaines personnes sont capables de percevoir. Les sœurs Ness, Adrana et Fura pour les intimes, possèdent ce don. La première, rebelle et aventureuse entraîne la seconde, sage et raisonnée, dans une aventure qui les changera toutes les deux à jamais.
En leur qualité d’oracle particulièrement sensibles, les sœurs Ness sont rapidement repérées par le capitaine Pol Rackamore, qui les engage à bord de son vaisseau, le Lamentation-de-Monetta. Là, elles occuperont un rôle primordial, elles seront responsables de la salle du crâne, qui permet d’émettre et de recevoir des messages entre les vaisseaux et les mondes. Tout bascule lorsqu’elles croisent la route de Bosa Sennen, la plus terrible pirate de l’espace, si cruelle que beaucoup la croient légendaire.
Un univers cohérent et bien ficelé
Avec son récit narré à la première personne, Vengeresse se lit comme les mémoires d’un personnage racontant ses propres aventures. Un exercice parfois maladroit, tant dans le style que dans le fond, mais particulièrement immersif. La protagoniste, Fura Ness, étant une parfaite néophyte dans l’univers dépeint, le lecteur apprend pas à pas les ficelles de ce monde de technologie, de navigation spatiale et de chasse aux trésors.
Exit les voyages à vitesse supraluminiques, l’hyperespace, les moteurs à fusions nucléaires et autres canons laser. Ici, les voyages spatiaux prennent des semaines, sinon des mois, et se limitent au simple système Solaire, où des milliers de petits mondes ont été terraformés et rendus habitables au fils des millions d’années et des diverses occupations. Pour se déplacer, les vaisseaux utilisent des moteurs ioniques mais surtout des voiles qui tirent parti des vents solaires.
À bord de ces nefs spatiales qui courent après la fortune, chaque membre de l’équipage occupe un rôle dédié. Ainsi : le capitaine, l’augure, l’intégrateur, l’oracle, l’évaluateur et l’ouvreur (dont on taira les rôles pour laisser aux lecteurs la surprise) cohabitent et s’entraident dans leur quête, ce qui donne naissance à une alchimie entre les personnages digne de celles qui font la profondeur et le succès d’œuvres comme Firefly ou encore Star Trek.
Histoire de grandir
Vengeresse brille par son univers intrigant et rondement ficelé mais aussi par ses personnages, attachants pour certains, détestables ou pitoyables pour d’autres. Au-delà de la chasse aux trésors entreprise par la protagoniste, et des mésaventures qui s’ensuivent, c’est un voyage initiatique intérieur que décrit ce roman. Un voyage que tout un chacun entreprend à un moment de sa vie : celui du passage à l’âge adulte. Confrontée au danger, menée à faire des sacrifices et à prendre des décisions (parfois regrettables), Fura Ness va progressivement laisser derrière elle l’enfant sage et bien éduquée qu’elle était pour devenir une femme forte et déterminée.
Seuls points à déplorer : certains éléments de l’intrigue, qui servent à alimenter ce récit, sont hélas forts convenus. Le titre de l’œuvre lui-même, qui a le mérite de ne pas être mensonger, en est la preuve. Il s’agit ici d’une histoire de vengeance, comme il en existe aujourd’hui d’innombrables. À cela s’ajoute une fin précipitée qui tease, sans s’en cacher, une suite à cette aventure – un peu à la manière d’un « The Avengers will be back » apparaissant sans surprise et paresseusement après les crédits d’un film Marvel.
En somme, Vengeresse est un livre prenant lorsqu’il est lu pour ce qu’il est : un roman de hard science-fiction bien ficelée, au récit divertissante même si parfois classique, et adressé à un public young adult.