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Dossier Premium : La grande saga de Warcraft
Par Alfro
9 février 2015
La fantasy est le refuge des grandes sagas, des histoires qui se prolongent inexorablement à mesure que les intrigues se multiplient, que les dénouements soulèvent de nouvelles alliances ou de nouvelles trahisons et que de nouveaux héros apparaissent. Que ce soit en littérature, où l'on voit Robin Hobb sortir un nouvel Assassin Royal, au cinéma où Peter Jackson aura mis six films à déployer sa vision de l'univers de Tolkien ou en série TV, où Game of Thrones s'apprête à revenir pour une cinquième saison.
Le jeu vidéo n'est pas épargné avec une saga qui a fêté l'année dernière ses vingt années de bons et loyaux services. La saga Warcraft qui revient encore sur le devant de la scène alors que Blizzard s'amuse à créer un mod de son jeu de fantasy dans Starcraft II, que World of Warcraft s'est fait un petit lifting au passage de Warlords of Draenor et que Duncan Jones veille jour et nuit dans sa salle de montage pour finaliser l'immense film qui lui sera consacré en 2016.
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- Warcraft : Orcs and Humans
2
- Warcraft II
3
- Warcraft III
4
- World of Warcraft
5
- L'histoire sans fin
1.
| Warcraft : Orcs and Humans
Warcraft : Orcs and Humans
En 1994, Blizzard Entertainment n'a encore que trois ans. Lancé sous le nom de Silicon & Synapse, le petit développeur s'est déjà fait un petit nom avec The Lost Vikings (bientôt dans Heroes of the Storm !) et se sont fait la main sur des portages de jeux, comme sur The Lord of the Rings pour le compte de EA Sport. Faut dire que même si c'est un boulot alimentaire, ces fans de Tolkien ne se sont pas trop fait prier.
Justement, ils aimeraient bien trouver l'occasion d'inventer leur propre univers inspiré par celui qui voit des légions d'orcs venues du Mordor se répandre sur les royaumes humains. Gardant cette idée en tête, ils vont découvrir dans Dune II que vient de sortir le studio Westwood le moyen de concrétiser leur idée. Germe alors ce jeu de stratégie en temps réel qui deviendra Warcraft : Orcs andHumans.
Tout justes renommés Blizzard Entertainment, le studio travaille rapidement sur son jeu, en employant vingt-cinq employés pour l'ensemble du développement. L'univers est sommaire et le scénario simple, un chef charismatique, Blackhand, parvient à unir tous les clans d'orcs pour attaquer le royaume humain d'Azeroth. Deux armées, une dizaine d'unités chacune et deux campagnes distinctes selon la faction.
L'accent est ici mis sur le gameplay, qu'ils vont s'acharner à livrer le plus précis et le plus équilibré possible. Le scénario n'est alors qu'un prétexte sur lequel on va dépêcher Samwise Didier et Chris Metzen pour imaginer rapidement comment pourraient être caractérisées ces deux races et leurs interactions. Le jeu mettra un peu de temps à intéresser les magazines, mais Warcraft va vite devenir un carton, dépassant largement les ventes des jeux précédents de Blizzard et devenant avec Command & Conquer le nouveau standard des RTS. Une immense saga vient de voir le jour sans qu'ils ne le sachent vraiment.
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2.
| Warcraft II
Warcraft II
Suite au succès aussi colossal qu'inespéré du premier Warcraft, les investisseurs de Blizzard Entertainment réclament une suite immédiate. Ce qu'ils vont faire un en temps record, poussés par l'élan du premier opus et par les développeurs qui les ont rejoint et qui portent alors le nombre d'employés travaillant sur le jeu à 40. Débuté en janvier 1995, le jeu sortira avant la fin de l'année, presque un an jour pour jour après le premier épisode.
C'est alors que Chris Metzen va prendre du galon, s'installant de façon pérenne, car s'ils ont la base technique pour faire leur jeu (ils ajouteront tout de même un élément important : le brouillard de guerre), les développeurs souhaitent désormais mettre l'accent sur le scénario. Pour cela, ils vont introduire de nouvelles races, Nains, Elfes, Gnomes et Trolls, qui seront intégrées aux deux factions déjà présentent : l'Alliance et la Horde. Ce qui est intéressant de noter, c'est que la continuité officielle est celle qui voit la victoire des Orcs dans le premier opus et qui reprend donc la fin de leur campagne.
C'est à ce moment que les humains mal en point vont s'installer à Lordaeron et bâtir leur coalition pour repousser les orcs d'Orgrim, Doomhammer et Gul'dan, jusqu'au portail qui les renverraient dans leur dimension. Ce qu'ils vont réussir à faire dans la campagne des humains qui sera celle choisie cette fois-ci, comme le révèle la sortie de la toute première extension de l'histoire de la saga : Warcraft : Beyond the Dark Portal. Un peu énervés de voir sans cesse les orcs débarquer chez lui, le mage Khadgar décide de marcher avec ses troupes sur Draenor (tiens tiens...) pour détruire les portails à la source. Il est bloqué mais il a gagné.
Ce soin apporté au scénario (où les trahisons et les alliances se multiplient) est renforcé par ce qui deviendra bientôt une marque de fabrique de Blizzard et qui fait ses grands débuts dans ce deuxième opus : les cinématiques ! Surtout, l'extension permet de prendre le contrôle des héros comme Khadgar ou Grom Hellscream, plus puissants que des unités de bases et possédant leurs propres capacités.
Toutes ces innovations vont contribuer à faire de Warcraft II un véritable hit, qui va permettre à Blizzard de s'établir comme l'un des studios les plus importants (et de ne rien pouvoir faire contre son rachat par Vivendi, ceux-ci rachetant leurs investisseurs), le CD s'écoulant à plus de deux millions d'exemplaires avant l'arrivée d'une ultime extension qui va avoir une importance plus que cruciale. En effet, sort en 1999 le jeu Warcraft II : Battle.net Edition. Ils viennent l'air de rien de créer l'e-sport, qui sera rendu encore plus populaire par Starcraft, sorti quelques mois plus tôt et qui reprend le même moteur de jeu.
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3.
| Warcraft III
Warcraft III
Blizzard Entertainment se concentrant sur Diablo (puis sa suite) et Starcraft, il faudra attendre 2002 pour découvrir Warcraft III : Reign of Chaos. Faut aussi dire qu'ils avaient un temps considérer faire un jeu d'aventure, Warcraft Adventures, avant d'abandonner le projet, puis il changèrent de direction au cours du jeu alors qu'ils étaient partis sur un jeu plus proche des MOBA d'aujourd'hui en intégrant des éléments de Diablo avant de revenir sur un RTS plus classique.
Ils introduisent la 3D dans la saga et dévoilent enfin deux nouvelles factions, les elfes de la nuit et les morts-vivants, portant le nombre de races jouables à quatre. Chacune joue son rôle dans une campagne solo beaucoup plus travaillée que les précédentes. On commence ainsi par suivre les humains et leur héros Arthas alors qu'ils cherchent à repousser les morts-vivants de Kel'Thuzad. Ils échoueront et Arthas va même passer au service du Roi Liche, si bien qu'on le suit à nouveau mais dans la campagne des cadavres ambulants cette fois-ci. On va alors prendre le contrôle de Thrall, esclave qui réunit les orcs restés bloqués sur Azeroth et qui s'en va lui aussi contrer les hordes démoniaques.
La campagne solo se finit alors que l'on suit Tyrande qui va réveiller Malfurion et le frère de celui-ci, Illidan. Ce dernier va lui-même devenir un démon tandis qu'orcs et humains s'unissent pour repousser les ennemis morts-vivants, ce qu'ils vont parvenir à faire en tuant le démon Archimonde. Pour ce jeu, Blizzard gagne en maturité, focalisant son écriture sur les héros pour intensifier l'intrigue. Surtout, ils proposent une fin unique à toutes les races, en créant un fil narratif qui permet de toutes les jouer au fur et à mesure.
Le jeu a un succès si colossal qu'il est le jeu PC le plus vendu de tous les temps à sa sortie. Blizzard annonce un an après sa sortie qu'ils ont écoulé trois millions d'exemplaires de ce troisième opus. C'est donc plus que confiants qu'ils dévoilent Warcraft III : The Frozen Throne, l'extension qui reprend l'histoire là où elle s'était arrêtée. Elle introduit deux nouvelles factions : les Nagas et les Draeneï. Cependant ceux-ci ne seront pas jouables en ligne, confirmant que l'e-sport va se concentrer sur Starcraft (la sortie sept ans plus tard de Starcraft II finira d'achever la carrière de Warcraft en ligne, malgré une communauté encore très active).
On démarre l'extension en incarnant Maiev, l'ancienne gardienne d'Illidan qui s'est lancée à sa poursuite. La confrontation avec le chasseur elfe de la nuit et Malfurion va permettre au paria de se faire pardonner alors que l'on découvre les Elfes de Sang qui guerroient contre les humains. Les deux dernières campagnes permettent de retrouver Arthas, allié à Anub'Arak, alors qu'il affronte successivement Sylvanas et Illidan. Il parvient alors à devenir le nouveau Roi Liche et que la première de ses adversaires installe le royaume mort-vivant à Lordaeron. Le dernier jeu purement Warcraft se finit donc sur la victoire des damnés, confirmant que Blizzard est prêt à aller partout avec son histoire. Il nous laisse une autre note cependant avec une campagne bonus où l'on voit Rexxar installer la Horde à Durotar et Jaina Proudmoore prendre la tête de l'Alliance.
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4.
| World of Warcraft
World of Warcraft
L'histoire des RTS Warcraft s'arrête (pour le moment ?) ici, alors que Chris Metzen et ses scénaristes sont parvenus à installer un tout nouveau status quo dans leur univers qui pourrait donner lieu à des développements passionnants. C'est qu'ils ont une petite idée en tête, annoncé avant même la sortie de Warcraft III, le MMORPG World of Warcraft sort en 2004, un an après qu'ils aient publié la dernière extension. Un développement au long cours qui est magnifiquement raconté dans le documentaire qu'ils avaient réalisé pour les 10 ans du jeu.
Ils vont bâtir dans ce jeu (et reprendre des idées ici et là) les marques incontournables des jeux du genre, instances, hôtel des ventes, montures. Tout un vocabulaire nait et le jeu a un succès considérable et immédiat, qui continue encore actuellement avec 7,4 millions d'abonnements encore actifs. Une manne financière que Blizzard Entertainment va sans cesse réinjecter dans son jeu en produisant de nouvelles extensions qui maintiennent un intérêt constant pour l'univers en perpétuel mouvement.
L'histoire reprend quatre ans après les événements de Frozen Throne et le joueur se retrouve plongé dans cet univers où les morts-vivants pullulent dans Lordaeron, les Orcs se sont emparés de Durotar et les humains se préparent patiemment à la montées des forces qu'ils aperçoivent dans les rangs de la Horde. Cet état de paix toute relative sera très vite bouleversé avec la première extension en 2007 : The Burning Crusade. On y voit les démons ouvrir un passage entre Azeroth et Outreterre, s'ensuit le premier rush XP de l'histoire de WoW et des millions de joueurs fonceront tête baissée pour être le premier à donner le coup fatal à un Illidan définitivement corrompu par les démons. Finalement, on assistera à une nouvelle entente entre l'Alliance et la Horde pour défaire Kael'thas qui vient d'invoquer le seigneur démon Kil'Jaeden.
L'extension suivante va s'adresser directement au cœur des joueurs de Warcraft III puisque Wrath of the Litch King voit le retour d'Arthas. Encore une fois, les deux factions s'allient pour défaire cet adversaire commun qui veut déverser ses légions de morts-vivants sur le monde. Après une rude bataille navale, Arthas ressuscite Saucroc, le plus puissant de vos alliés, et c'est ce duo qu'il faut détruire pour finir l'extension. Cette extension sera sans doute la plus appréciée, d'autant plus dommage que suive celle qui vit un grand nombre de joueurs partir de WoW. En effet, Cataclysm vit la refonte totale du monde après le réveil d'Aile-de-Mort, l'un des cinq plus puissants dragons d'Azeroth. Non seulement il détruira tout sur son passage, mais surtout ici que Blizzard va opérer une simplification drastique du gameplay qui va déplaire à un grand nombre de joueurs de longue date.
Ce ne sont pas les Pandarens de Mists of Pandaria qui les firent revenir (même si nous personnellement, on les aime beaucoup, parce que JackieChan). En revanche, le challenge proposé par Warlords of Draenor permit de redonner un coup de boost impressionnant au jeu. Surtout, il a permit de tout réécrire après le Cataclysme puisqu'il propose une uchronie où les orcs n'auraient pas cédé à la Légion Ardente avant les événements du tout premier Warcraft. On peut alors se demander ce qu'ils comptent faire à partir de là, surtout qu'ils se voient bien continuer pendant un moment. On pourra aussi se demander si les patchs successifs serviront à couvrir le vieillissement d'un jeu qui commence à se faire ressentir alors qu'il a soufflé ses dix bougies d'existence.
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5.
| L'histoire sans fin
Ainsi, si l'histoire de la saga Warcraft va encore connaître bien des chamboulements dans les années qui viennent, elle va aussi se développer vers de nouvelles perspectives. Ainsi, si le jeu Hearthstone prouve bien une chose, c'est que l'univers est si vaste désormais qu'il permet de se lancer tranquillement dans de nouvelles déclinaisons, parfois surprenantes comme ce jeu de cartes, qui est une transposition sur la toile de l'ambiance si particulière des tavernes d'Azeroth, façon Triple Triad de Final Fantasy - encore une idée vulgarisée jusqu'à l'excellence. Surtout que ce monde s'universalise petit à petit puisque le nombre de joueurs touchés est proprement colossal.
Si en plus de ça, on voit les héros que l'on suit maintenant depuis des années vivre une nouvelle vie dans Heroes of the Storm, parfois sous des formes totalement inédites et aux côtés des héros de Starcraft et Diablo, on est obligé d'admettre que Blizzard a su porter son univers qu'il a choyé à une expansion qui ne connait aucune limite. Désormais, on les retrouve dans des romans, des comics, dans des statuettes vendues à prix d'or, et même bientôt, en film.
Et pas n'importe quel film. Blizzard est certes devenu un géant de l'industrie, mais difficile de lui reprocher quoique ce soit dans l'éthique. Quand les développeurs annoncent qu'ils arrêtent tout sur le projet Titan parce qu'ils n'arrivaient pas à trouver la passion, on comprend que leur succès découle surtout de l'amour qu'ils portent à leur jeu. Et ils n'étaient près de laisser n'importe qui transposer leur univers sur le grand écran. Avoir choisi Legendary Pictures et son maître geek de président, Thomas Tull, c'est gage d'un traitement par le haut de leur création.
Voir arriver Duncan Jones ne pouvait être que la meilleure confirmation de cet élan. Le réalisateur de Moon, et accessoirement fils de David Bowie, s'est fait remarquer avec un film très profond et un sens de l'image de bon goût (confirmé par son Source Code). Il a d'ailleurs demandé à avoir deux ans de post-production pour achever son long-métrage dont le tournage est terminé depuis l'été. Ce qu'il laisse entendre dans les rares déclarations qu'il accorde laisse aussi à penser qu'à l'esthétique, il rajoutera une profondeur bienvenue à cette intrigue inspirée du tout premier Warcraft. Il y a fort à parier qu'à la sortie du film le 9 mars 2016, ce monde de la pure fantasy envahira encore de nouveaux esprits, et essayera ce que personne n'a entrepris avant lui : déloger Tolkien et son adaptation par Peter Jackson. Revenez à l'introduction de ce dossier et vous comprendrez toute l'ironie de la situation.