Qui est PVH éditions ?
PVH éditions, une maison Suisse consacrée aux littératures de l'imaginaire, arrive peu à peu sur les territoires belges et français. PVH, fondée en 2014 par Lionel Jeannerat et Cristophe Gérard, et diffusée en Suisse à partir de 2016, se distingue à la fois par l'originalité de sa vision éditoriale et par son engagement en faveur de l'open-source.
C'est à dire que les oeuvres qu'ils publient ne sont pas destinées toujours à demeurer des romans ; elles peuvent évoluer au gré des envies de l'auteur, des divers supports qui peuvent l'accueillir et de toutes les ressources disponibles pour la création, que ce soit la modélisation 3D, de l'audio inclut dans le livre, etc.
Ce point complète l'autre grand engagement de PVH édition pour l'open-source. Leurs livres sont disponibles à la réécriture, au détournement, bref, chacun peut se les approprier et en faire ce qu'il veut. Et les projets qui naissent de leur lecture n'ont pas à rester confinés dans l'écriture.
PVH édition est donc une maison expérimentale et engagée, qui arrive avec des projets propres à changer le monde du livre. Son arrivée en France, à nos yeux, est un vrai motif de réjouissance !
Et pour communiquer sur cette diffusion et leurs projets, PVH a fait à SyFantasy l'honneur de devenir son interlocuteur privilégié. C'est avec un grand plaisir que nous publions cette interview écrite - qui avait été l'occasion pour nous aussi de faire connaissance avec PVH - et à laquelle a répondu le co-fondateur de la maison Lionel Jeannerat.
Une rencontre est prévue avec Lionel le 25 janvier : à cette occasion, nous enregistrerons un épisode du podcast, où nous tâcherons d'en apprendre plus sur son parcours d'éditeur, et sur l'approche, novatrice, de la littérature qu'a PVH édition.
L'interview
Maxime Carraz : Pourriez-vous nous présenter PVH édition ? Allons d’abord, si vous voulez bien, à l’essentiel : dans quels genres publiez-vous, quelle est votre ligne éditoriale, quels sont vos titres phares ?
- Lionel Jeannerat : PVH éditions est une maison franco-suisse. Nous éditons de la littérature SFFF. Notre ligne éditoriale se distingue par un choix assez strict des projets et nous aimons ensuite les approfondir par des suppléments et/ou des nouveaux formats. Nous souhaitons également tendre vers « le libre », en essayant d’utiliser des logiciels libres ou en expérimentant l’édition sous licences libres. Des projets sont prévus en 2023 dans ce domaine.
Au niveau de notre catalogue, nous avons la collection-phare Ludomire qui débarque dans les librairies de France et de Belgique. Parmi celle-ci, nous avons un bestseller de Fantasy helvétique : Les Chroniques des Regards perdus de Pascal Lovis. Dans les titres plus récents, nous avons la série ONE MINUTE de Thierry Crouzet qui est un roman de science-fiction qui casse les codes narratifs en proposant une fresque impressionniste sans progression temporelle, déroutant et addictif. En dehors de cette collection, nous avons La légende du Bretteur qui se battait pour un petit pois de Christophe Gérard, notre premier roman qui est en cours d’adaptation en roman augmenté.
MC : Pouvez-vous nous parler de l’histoire de PVH édition ? Depuis combien de temps votre maison existe-t-elle, qui sont ses fondateurs ou fondatrices, dans quelles conditions l’ont-ils ou elles fondée, avec quelles motivations ?
- LJ : Tout a commencé en 2014, lorsque j’ai proposé à Christophe Gérard d’éditer son livre après une mauvaise expérience avec un éditeur peu scrupuleux, suivi d’une campagne de crowdfunding fructueuse. Il faut dire que Christophe et moi collaborions de longue date et nous avions envie de travailler ensemble. Après cette première publication, nous avons petit à petit étoffé notre catalogue et nous nous sommes taillés une excellente réputation en Suisse, notamment grâce au premier volet des Chroniques des regards perdus : L’héritage des Sombres.
Ainsi en 2016, nous avons signé un contrat de diffusion pour la Suisse et nous avons poursuivis nos expérimentations éditoriales. En 2018, nous avons posés les bases d’une nouvelle collection au design affirmé : Ludomire. En 2020, j’ai décidé de mettre le turbo et de m’investir à fond dans l’entreprise. Le projet subsidiaire entre amis devient un projet professionnel. Il prend alors son nom actuel : PVH éditions.
En deux ans, on double le catalogue général et la collection Ludomire prend son essor. En 2022, nous signons pour la France et la Belgique un contrat avec un diffuseur séduit par notre collection-phare.
MC : Quel est votre rôle, à vous, au sein de PVH édition ?
- LJ : Je suis l’homme-à-tout-faire ou directeur. Je dirige la société, fais les choix éditoriaux, je gère les contrats mais, à côté, je livre des cartons de livres, je passe l’aspirateur dans le bureau. C’est comme ça dans une petite maison d’édition, il y a plein de choses différentes à faire et il faut bien que quelqu’un les fasse. Depuis quelque temps, je me suis déchargé du suivi éditorial sur notre éditrice engagée depuis une année.
MC : Comment le succès de PVH s’est-il constitué ces dernières années ? Qu’est-ce qui vous pousse à passer d’une diffusion exclusivement en Suisse, à une diffusion également en Belgique et en France ?
- LJ : Lors d’un salon du livre, mon diffuseur suisse m’avait dit : « Vous faites un sans-faute au niveau de la qualité. C’est rare pour un éditeur qui se lance, il faut le conserver ». À l’époque, nous étions encore amateurs mais je crois que c’est vrai : nous avons toujours cherché à sélectionner des livres de qualité et à prendre soin que nos livres soient beaux.
Au moment de nous professionnaliser, j’ai voulu inscrire cette démarche dans notre ligne éditoriale : la qualité plutôt que la quantité. La diffusion hors de Suisse a toujours été un objectif mais pour cela il faut avoir un catalogue séduisant et les reins assez solides financièrement et humainement.
Aujourd’hui, notre présence dans les librairies en France et Belgique est une forme d’accomplissement car nous révélons aux yeux du public non-suisse les « diamants » que nous avons patiemment sélectionnés, polis et taillés depuis des années.
MC : Comment définiriez-vous rapidement le concept d’imaginaire ? Pourquoi vous être engagé dans ce genre de littérature ?
- LJ : Je n’aime pas trop le terme « imaginaire », je lui préfère le terme SFFF qui donne un aperçu de tous les sous-genres que cache ce type de littérature.
Dans la collection Ludomire, nous avons de la dystopie humoristique, de l’aventure fantastique, de la fantasy héroïque, de l’historique fantastique, du space opera, de l’anticipation décentralisée, de la fantasy inclusive…
Et notre planning 2023-2024 continuera à explorer la diversité du genre. Nous éditons avant tout des manuscrits originaux qui nous ont touchés ou intrigués d’une manière ou d’une autre. Les autres collections sont un moyen d’explorer des formats différents : romans illustrés, livres univers, etc. Mais la logique de sélection reste la même.
MC : Y a-t-il une volonté militante dans votre démarche éditoriale ? Si oui, est-elle liée, et comment, en quelques mots, à votre conception de l’imaginaire ?
- LJ : Notre passion n’est pas de « juste » imprimer des livres et les vendre. À l’image de nos auteur·rices, nous essayons d’adopter une position créative et cohérente dans notre manière d’éditer.
Nos sociétés rencontrent aujourd’hui des défis numériques dans une perspective de développement durable : la promotion d’une meilleure hygiène numérique, le développement et la défense des communs numériques. En cohérence avec nos convictions, nous avons donc inscrit dans notre ligne éditoriale notre intérêt pour la culture du libre. Cela signifie que nous nous efforçons d’utiliser et de promouvoir les logiciels libres, nous cherchons également à expérimenter une démarche éditoriale qui permettrait d’enrichir les communs artistiques.
À ce propos, nous annoncerons en janvier notre projet de « libérer » la collection Ludomire en 2023. L’idée est d’en faire une série entièrement sous licence libre Creative Commons BY-SA (voir note *1). Nous la proposerons également sous des formats originaux qui faciliteront son partage et sa diffusion. Parmi ceux-ci, nous voulons promouvoir un format facile à imprimer à la maison, le print@home. Tout ceci est un de nos grands chantiers de 2023 et, si ça vous intéresse, nous vous invitons à suivre le blog de PVH éditions qui explique en détail notre démarche.
MC : J’ai entendu dire que vous faites aussi des jeux-vidéo et des livres augmentés. Pouvez-vous nous expliquer ce qu’est un livre augmenté ? Quelle est votre ligne éditoriale concernant vos créations vidéo-ludiques ?
- LJ : Le deuxième grand chantier de 2023 ! Un livre augmenté est une adaptation d’un roman sous une forme multimédia qui allie texte, modélisation 3D, motion capture, illustrations, lecture enregistrée, musique et bruitage. C’est assez comparable à un jeu vidéo du genre visual novel.
Nous avons fait les premiers essais en 2022 et les réactions du public ont été très positives. En 2023, nous comptons adapter la collection Bretteur, composée de quatre livres, ainsi qu’un roman du domaine public, Candide, de Voltaire. L’objectif est de démontrer que ce format est une adaptation pertinente qui peut toucher de nouveaux publics. Ensuite, nous adapterons toutes les œuvres de notre catalogue qui s’y prêtent.
MC : Quand est-ce que PVH édition arrivera en France ? Vos projets pour 2023 seront-ils publiés simultanément en France et en Suisse ? Pouvez-vous nous en toucher un mot ou deux ?
- LJ : Les dix premiers volumes de la Collection Ludomire ont fait leur apparition dans les librairies fin novembre. Les six derniers romans de la collection sortiront de manière échelonnée pendant le premier semestre 2023. Il s’agit d’un rattrapage par rapport aux sorties en Suisse. Dès l’automne 2023, quatre nouveaux livres de la collection sortiront simultanément dans toute l’Europe. On y travaillera.
J’espère aussi, mais ça ne dépend pas que de nous, que nous pourrons diffuser la collection Bretteur et nos autres livres dès l’automne 2023. Ça dépendra sans doute du succès de nos premières sorties en librairie.
Quoi qu’il en soit, nous sommes très enthousiastes pour l’avenir de notre petite maison d’édition.
Pour tous ceux qui voudraient continuer leur découverte de PVH éditions : voici leur site, et ici, voici leur catalogue en ligne.
*1 : La licence BY-SA indique le titulaire des droits autorise toute utilisation de l’œuvre originale (y compris à des fins commerciales) ainsi que la création d’œuvres dérivées, à condition qu’elles soient à leur tour distribuées sous une licence BY-SA. Cette licence est souvent comparée aux licences “copyleft” des logiciels libres.”