Critiques

Les Nefs de Pangée, le meilleur de la fantasy et de la SF ?

Par Dragonarcane
3 min 23 mai 2024
Les Nefs de Pangée, le meilleur de la fantasy et de la SF ?
On a aimé
Un monde passionnant et original
Une écriture comme il y en a peu
Des personnages aussi variés que profonds
On n'a pas aimé

Je n'avais jamais entendu parler de Christian Chavassieux ni de ses livres avant de recevoir celui-ci un peu par hasard : la couverture était jolie, le titre mystérieux ; malgré les quelques cinq cents pages, je me suis dit que je pouvais essayer la traversée.

 

J'ai sombré.

 

Un coup de coeur, un coup au cœur, presque immédiat. Le sentiment de toucher à une œuvre véritable, celle qui vous marque non seulement pour l'année, mais aussi pour le reste de votre périple de lecteur. Le petit cercle des classiques personnels, ceux qui hantent les souvenirs comme le futur, des références personnelles à la portée universelle.

Bref, comme j'ai aimé Les Nefs de Pangée !

 

Un monde à couper le souffle

Ce n'est pas peu de le dire : quiconque commence à sillonner les premières lignes sent immédiatement toute la profondeur de l'écriture, du monde et ses abysses terriblement attrayantes. Le raffinement se fait sentir : chaque mot joue, chante, et la mécanique d'ensemble frappe, semble à la fois réelle et parfaite. Ce monde étrange, peuplé par des êtres humains (ou humanoïdes?), à la fois assez développés pour construire des nefs géantes à la poursuite d'un monstre mythique et assez originaux pour vivre en aborigènes, captive. La jungle d'abord opaque des mots et des choses s'éclaircit alors que nous parcourons Pangée et l'Unique, la terre et la mer, sous le même ciel où l'on cherche un reflet connu. Car tout semble familièrement étranger, on se demande à chaque page pourquoi on est à la fois ici, et là-bas.

 

La carte avec laquelle s'ouvre cette nouvelle édition (sortie le 15 mai) par Mnémos est précieuse, aussi bien parce qu'elle nous offre des repères que parce qu'elle nous perd : la mer, elle, est en creux, c'est-à-dire nulle part et partout. Les voyages maritimes sont souvent négligés ou ennuyants dans les récits d'imagination comme de voyage : j'ai cru sentir les vagues de Pangée sur ma peau, la peur de l'Odalim dans mon cœur. Les mots ne s'oublient pas pour autant, et j'ai été, sacrilège ultime, porté à mon crayon (de papier, bien sûr) pour souligner quelques mots, une phrase çà et là, dont chaque lettre semblait avoir trouvé la place la plus juste. Une des seules lectures qui m'avaient fait cet effet là, c'est Jean-Philippe Jaworski (leurs qualités sont parfois très différentes, mais de même tenue). Quand on sait comme j'aime et loue ce dernier, il n'y a pas meilleur éloge.

 

Une réflexion sans fond

 

On commence l'ouvrage avec bien des questions, et on y reçoit des réponses à d'autres questions, celles que l'on ne se posait pas, les vraies. Car Les Nefs de Pangée ne se contente pas d'être esthétique, une gemme de mots et de fiction, mais s'ancre aussi profondément dans des débats et des peurs contemporaines : Qu'est-ce qu'être humain ? Un peuple ? Moderne ? Un héro ? C'est à une réflexion aussi bien politique que morale, profondément originale, que nous invite ce livre, sans chercher à nous imposer de route précise : à chacun de suivre les courants qui le portent.

 

De même, les références littéraires infusent l'ouvrage, sans jamais s'imposer. L'incipit de Salammbô s'est par exemple glissé au début d'un chapitre ; celui-ci garde toute sa saveur même si on le lit sans s'en rendre compte. C'est là une force précieuse, qui permet plusieurs lectures, plusieurs aventures, toutes inoubliables, pour tous les lecteurs.

 

Conclusion

 

Peut-on dire autre chose que merci après avoir refermé ce livre ? Peut-être vous inviter à le lire, à vous faire votre propre avis sur cet inclassable, entre fantasy et science-fiction, entre deux eaux qu'il parvient toutes les deux à maîtriser.

Moi en tout cas, je sais quelles vont être mes prochaines lectures.

 

Pour les courageux volontaires sur forts esquifs, c'est ici !

Les Nefs de Pangée, le meilleur de la fantasy et de la SF ?