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Critique - L'Homme nu (Dan Simmons) : Un très beau texte sur l'amour et la télépathie par l'auteur d'Hypérion

Par Louis - CINAK
3 min 1 juillet 2021
Critique - L'Homme nu (Dan Simmons) : Un très beau texte sur l'amour et la télépathie par l'auteur d'Hypérion
On a aimé
- Le style hollywoodien
- Les scènes mélancoliques et douces
On n'a pas aimé
- Les scènes trop mathématiques et théoriques

Les pensées de Gail l’atteignirent juste au moment où la douleur reparut comme une aiguille infiniment pointue qui s’enfonça derrière son œil gauche.

On ne présente plus l’auteur d’Hypérion ou de l’Echiquier du mal. Mais ce que l’on connaît moins c’est toute son œuvre sociale, voire presque philosophique qui mêle propos politique et science-fiction dans une ambiance proche de notre quotidien. L’Homme nu n’y fait pas exception. Ici, il est question de la pensée humaine et de ses plus noirs secrets.

Jérémy Bremen et sa femme, Gail, peuvent lire les pensées des autres. Leur présence mutuelle les protège de ce parasitage constant grâce à un bouclier mental. Sauf que Gail vient de mourir d’un cancer que Jérémy est désemparé. En plus du deuil de son âme sœur, il doit vivre avec les images qui lui envahissent l’esprit et qui sont toujours sombres, dérangeantes et cruelles. Commence alors pour lui un road-trip de l’Amérique, infernal tant mentalement que moralement.

Pour nous lecteur, L’Homme nu s’apparente à une descente en enfer malgré la fuite du personnage qui n’aura de cesse de se faire ballotter par les événements pour fuir son deuil. Sans sa femme, Jérémy n’arrive plus à ériger de barrière avec la « neuro-rumeur » et le flot de pensées (souvent) hostiles des gens qu’il va croiser lors de son périple. Dan Simmons nous brosse le portrait d’une Amérique terrifiante avec chaque image projetée dans l’esprit de Jérémy comme autant de petites histoires personnelles : du SDF au gangster, en passant par le pédophile, tout le monde y passe. Dan Simmons se fait le porteur une vision extrêmement sombre du genre humain et L’Homme nu n’en est que le reflet.

Mais le roman est parfois jalonné de grands moments de douceur et de mélancolie avec des flash-backs de l’histoire d’amour entre Jérémy et Gail dans presque tous les chapitres. En cela, L’Homme nu est également une ode à l’amour fusionnel, mis en diapason du deuil qu’endure le personnage. Ses brefs moments de souvenir sont autant de bouffée d’air pour le personnage que pour le lecteur qui sort du présent cruel que vit Jérémy.

L’auteur a parfois un style très hollywoodien, permis par la télépathie de Jérémy. En effet, on perçoit certaines scènes avec le point de vue du héros mais aussi de son agresseur ou de son compagnon du moment, voire même de nombreux inconnus dans la foule, ce qui rend le tout très dynamique.

Jérémy étant scientifique de formation, certains passages du passé mêlant mathématiques abstraites, philosophie et géographie du cerveau sont par moments extrêmement complexes, ce qui dénote avec la clarté du reste de l’œuvre. J’avoue avoir parfois tiqué en ne comprenant que difficilement ces passages, tout en saisissant vaguement à quoi ils servaient le récit…

L’Homme nu est un roman très dur mais à découvrir car il traite de la notion de deuil avec un onirisme et une mélancolie qui fait honneur à l’œuvre de Dan Simmons. Avec sa vision noire de l’Amérique, il nous livre également un beau récit de vie et nous parle du réel de nombreux citoyens américains, loin de l’American Dream.

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Crédit illustrateur : Celia Teboul