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Dossier - Les 5 déclinaisons artistiques et produits dérivés de Dune de Frank Herbert
Par Louis - CINAK
10 min
11 septembre 2021
Dunede Frank Herbert a donné naissance à de nombreuses interprétations mais aussi à de nombreuses déclinaisons artistiques. Avant de regarder le film de Denis Villeneuve, SyFantasy vous propose de découvrir 5 supports ou produits dérivés inspirés de l’œuvre monumentale qu’est Dune.
1
- Le film de David Lynch et le projet avorté d’Alejandro Jodorowsky
2
- Les séries littéraires de Brian Herbert et Kévin J. Anderson
3
- Dune et le jeu vidéo
4
- Le jeu de rôle : Dune Adventures in the Imperium
5
- Tout sur Dune, le mook de Lloyd Chéry qui contextualise et explique l'univers
1.
| Le film de David Lynch et le projet avorté d’Alejandro Jodorowsky
Echec commercial, communément appelé un « four », vivement critiqué par les critiques de cinéma, et pourtant, l’adaptation cinématographique est devenue un classique du genre. Comme de nombreux classiques, le film est devenu culte au fil du temps. Curieusement David Lynch, le réalisateur, n’était pas un fan de science-fiction et n’a jamais lu Dune, pourtant il avait le vent en poupe et à longuement discuté avec Frank Herbert pour réaliser et écrire le film. Mais le tournage donne naissance à un film de 4 heures, puis 3 heures après une première découpe de David Lynch. Puis les producteurs le réduisent à 2 petites heures (et vont même jusqu’à retourner certaines scènes). Autant dire que la substance initiale et le fil rouge étaient perdus… Pourtant Sting endossait le rôle d’un Harkonnen et avait fait parler de lui avec son déguisement très (trop) sf pour l’époque. A lui seul, il avait massé de nombreuses personnes dans les salles !
Au moins trois versions ont été présentées au public, conduisant au reniement de l’objet cinématographique par le réalisateur lui-même. Il explique que les producteurs et les financiers ont dénaturé son film. La version présentée au public à la télévision a été marquée par l’infamie avec le nom du réalisateur remplacé par « Alan Smithee », pseudonyme utilisé par les réalisateurs qui ne souhaitent pas être associés au résultat final proposé au public !
A bien des égards, le film de David Lynch est unique par sa démesure. Les costumes empruntent au gothique (les fans d’Hellraiser ne seront pas en reste) et aux cultures Touaregs, tout comme aux vêtements des grandes cours européennes de la Renaissance… Et même si le réalisateur n’aimait pas la science-fiction, il a su infuser une image de l’espace et une musique qui influencent encore les jeux vidéo et les films d’aujourd’hui. Point intéressant, Frank Herbert lui-même a adoré cette version, sûrement parce qu’il pouvait y entendre les dialogues écrits de sa main.
Que dire du projet avorté d’Alejandro Jodorowsky qui avait l’air loufoque mais génialissime. Rachetés en 1975 (bien avant le projet de David Lynch), les droits passent entre les mains d’un consortium français qui place le grand scénariste à la tête d’une nouvelle adaptation. De grands noms du cinéma et des arts sont rapidement associés au projet : Michel Seydoux (en tant que producteur), Salvador Dali (dont on ressent l’influence dans les premiers visuels) ou encore Dan O’Bannon (le scénariste qui écrira Alien). Mais, mais… Jodorowsky n’est pas en odeur de sainteté auprès des financiers et les fonds manqueront. Ce qui n’a pas empêché les équipes de produire une bible visuelle qui aurait servi de support matériel de réalisation. Avec plus de 3 000 dessins et des costumes prototypés, « tout était prêt » pour débuter le film avec une imagerie complète. Les équipes avaient même prévu un ver de plus de 100 mètres de long…
Dans un entretien avec Claude Scasso, le réalisateur s’était confié sur sa perception de l’œuvre et, son Dune n’aurait rien eu à voir avec celui de David Lynch. Là où ce dernier se calquait sur le texte, quitte à proposer des scènes longues et « littéraires » avec des voix off sorties du fin fond du désert d’Arrakis, Jodorowsky se serait enfoncé dans le vide entre les chapitres. Il aurait décrit « la vie sur Arrakis, les fastes du Baron Harkonnen, l’organisation des armées, le Bene Gesserit ». En somme, il aurait fait le travail de Brian Herbert et de Kevin J. Anderson presque 20 ans avant eux et leur cycle littéraire.
En plus du Mook de Lloyd Chéry, je vous invite chaleureusement à découvrir le reportage « Jodorowsky’s Dune » qui met en lumière les éléments de cette bible avec des références culturelles foisonnantes, en plus de plonger dans un imaginaire déroutant.
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2.
| Les séries littéraires de Brian Herbert et Kévin J. Anderson
Dans les années 90, le fils de Frank Herbert, Brian Herbert, s’est donné la mission, avec Kévin J. Anderson, de compléter l’œuvre de son père. Humble, il sait que l’œuvre de son père se suffit à elle-même, mais il veut s’efforcer de nourrir les fans et leur imaginaire en détaillant les histoires esquissées par son père.
Plus didactique et moins métaphysique, ils lèvent le voile sur le passé intriguant de l’histoire deDuneet de l’Imperium. Leur Genèse de Dune est une mine d’or pour tous les fans de world-building car ils s’efforcent de présenter, de manière romancée, des points qui semblaient avoir marqué l’univers et les esprits des personnages du Dune originel. Le Jihad butlérien est souvent utilisé par Frank Herbert pour justifier l’absence de certaines technologies. Comme un Isaac Asimov, Frank Herbert avait inscrit les « machines pensantes » dans l’histoire de son univers. Et c’est le Jihad butlérien qui explique la présence des mentats, ces hommes capables de compulser à eux seuls des milliers de données. Herbert fils se propose donc d’expliquer la substance même de l’œuvre de son père, afin de la rendre la plus accessible possible.
Les fans de la maison Atréides seront comblés avec des récits entièrement dédiés au duc Leto ou à dame Jessica. En revenant sur leur enfance ou encore leur prise de pouvoir, les deux auteurs évoquent des événements proches temporellement de l’œuvre initiale et s’inspire grandement des dialogues d’Herbert père pour une restitution qui recherche la plus grande fidélité possible ! Les différentes maisons nobles passent également sous la loupe d’Herbert fils avec une trilogie dédiée respectivement à la maison Atréides, à la maison Harkonnen et à la maison Corrino (celle de l’empereur).
La force de leur travail est également de s’enfoncer dans le vide créatif de l’œuvre de Frank Herbert. L’occasion pour le lecteur de découvrir de nouvelles planètes, de nouvelles organisations, le tout dans le but de proposer une histoire plaisante et qui instruit le fan de Dune en quête de nouvelles aventures. Au même titre que le Canon ou le Légende de Star Wars (Kévin J. Anderson a d’ailleurs écrit des romans Star Wars), l’œuvre initiale dépasse la première histoire et est appropriée par les fans. Certains y verront une dénaturation de l’œuvre initiale, tandis que d’autres se satisferont de voir une œuvre monumentale comme Dune se perpétuer plus de 50 ans après le premier roman. A vous de vous en faire une idée.
La continuation d’Herbert fils et de Kévin J. Anderson est un beau moyen pour les fans inconditionnels de se replonger au cœur de l’Empire galactique et d’en découvrir l’histoire cachée entre les lignes du roman de Frank Herbert.
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3.
| Dune et le jeu vidéo
Adapté en jeu vidéo, Dune a changé l’industrie vidéoludique en profondeur. Sans lui, pas de Starcraft ou de Command & Conquer ! Dune II : La Bataille d’Arrakis fut le tout premier STR (Stratégie en Temps Réel) et marqua un jalon dans la manière de concevoir un jeu vidéo.
Avec une équipe hétéroclite, le projet de jeu voit le jour dans les années 90 et scénarise un jeu qui sera un énorme succès, tant pour la licence que pour l’industrie du jeu vidéo. Chaque jeu Dune a été positionné sur un public différent : le 1 se déroule au moment des livres et possède énormément de dialogues, tandis que Dune II est fondamentalement tactique et officialise l’appellation « stratégie en temps réel ».
Les scénarios sont très librement inspirés des romans. Par exemple, les Harkonnen sont encore fortement présents sur Arrakis tandis que, dans les romans, ils ont plié bagage sur ordre de l’Empereur. Mais il faut comprendre le studio de jeu vidéo, sinon comment introduire le conflit ?
Dans les jeux, le joueur incarne Paul Atréides et remplace Leto (il n’est pas trahi par son homme de main), pour ensuite prendre le contrôle total de la planète. Il est aidé en cela par les Fremen qui sont davantage des mercenaires que des fidèles du Messie de Dune, qu’il incarne dans les livres. Une grande partie du jeu consiste à découvrir des sietchs (les grottes des Fremen) cachés dans le désert pour recruter de nouvelles troupes, trouver de nouveaux équipements et avoir de nouveaux lieux d'où extraire l'Épice.
Les jeux ne se terminent pas par l’assaut final de l’Empereur et de ses Sardaukars mais plus par la destruction totale des places fortes Harkonnen ou alors par une reconquête écologique et un reverdissement intégral de la planète.
Les jeux Dune ont indéniablement marqué l’univers du jeu vidéo en proposant quelque chose de nouveau aux joueurs, au même titre que le roman a marqué la littérature en offrant au lecteur une lecture riche et métaphysique !
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4.
| Le jeu de rôle : Dune Adventures in the Imperium
Comme toute licence de science-fiction au succès retentissant, Dune a eu droit à son adaptation en jeu de rôle ! Bientôt traduit par Arkhane Asylum Publishing, le jeu de rôle par Modiphiuss’inspire des travaux de Frank Herbert mais aussi de ceux de Brian Herbert et de Kévin J. Anderson !
Le jeu de rôle donne l’occasion aux joueurs de fonder sa maison et de lutter avec et contre les autres nobles afin de prendre de plus en plus de place dans l’échiquier politique de l’Empire de Padishah Shaddam IV. Eh oui, tout se déroule avant les aventures de Paul Atréides ! (Bien que le jeu de rôle laisse tellement d’ouverture, qu’un Maître du jeu imaginatif pourrait proposer des scénarios sous le règne de l’empereur Paul…)
Le système de jeu reprend les bases de l’univers et permet progressivement de gagner en influence mais évidemment les grandes maisons ne se laisseront pas grignoter facilement. Le jeu inclut donc un système où votre renommée peut attirer, par exemple, les agents de la maison Harkonnen ! Les joueurs devront faire des choix politiques judicieux afin de survivre et enverront leurs agents résoudre des conflits en leur faveur. Ces joueurs pourront incarner des agents des Bene Gesserit, des émissaires, des guerriers… Tout est possible !
Crédit : Marc Simonetti
Grâce aux travaux d’Anderson et d’Herbert fils, les éditeurs ont introduit de nouvelles maisons dans le concert de la cour de l’Empereur, étendant ainsi l’univers de manière surprenante (mais toujours en cohérence et dans le respect de l’œuvre originale). Mais l’Epice reste toujours la ressource la plus prisée de l’univers, charge donc aux joueurs d’en devenir le maître.
5.
| Tout sur Dune, le mook de Lloyd Chéry qui contextualise et explique l'univers
Lloyd Chéry du podcast C’est Plus Que De La SF s’est lancé dans l’édition d’un Mook sur l’œuvre phénomène et a réuni pas moins de 47 experts et auteurs de science-fiction pour expliquer Dune, mais aussi étendre les réflexions abordées par Frank Herbert.
Véritable condensé du savoir d’Arrakis et de l’Empire aux cent conflits, Tout sur Dune (la seconde édition du mook), questionne les notions de pouvoir, d’écologie ou encore de féminisme et nous offre une vision à 360° de l’univers et des adaptations qui ont pu être faite de l’œuvre.
Les grands auteurs de la science-fiction française comme Catherine Dufour, Pierre Bordage ou encore Laurent Genefort apportent leur point de vue sur l’œuvre et nous expliquent pourquoi il faut lire et relire Dune. Tandis que Lloyd Chéry a eu la chance d’interviewer les continuateurs de l’œuvre de Frank Herbert comme son fils Brian Herbert ou Denis Villeneuve. D’anciens journalistes ont même retranscrit dans le mook les interviews qu’ils eurent la chance d’avoir avec Alejandro Jodorowsky ou encore Frak Klepacki (le compositeur des jeux vidéo Dune et de Command & Conquer) !
Sans rentrer dans le spoil, les personnages et l’univers sont abordés en détails tout en laissant une part de mystères, ce qui pousse à se replonger dans l’œuvre avec une nouvelle grille de lecture. En plus de rafraîchir l’histoire dans notre tête ! Le Mook aborde principalement les deux premiers tomes de la série et laisse de côté le travail de Brian Herbert (bien qu’une interview lui soit dédiée) pour explorer le cœur de l’œuvre et le message qu’a voulu véhiculer Frank Herbert.
Crédit : Aurélien Police
Ouvrage au savoir encyclopédique et aux intervenants intéressants, Tout sur Dune est le compagnon parfait des explorateurs en herbe d’Arrakis. Les sujets abordés et les points de vue divergents en font un travail remarquable qu’il faut lire avant d’aller voir le film de Denis Villeneuve !