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ScifiCinéma
Alien : quatre visions au service d'une saga mythique
Par Tom***
11 mai 2017
Une des grandes forces de la saga Alien réside dans sa capacité à être une oeuvre protéiforme. Au cours de ses 30 ans d’existence, la saga a connu quatre réalisateurs. Chacun apporte sa vision propre au mythe créé par Dan Bannon.
Mais là ou la Fox aurait pu choisir des Yes Men réalisant des films académiques, les personnalités retenues ont la force de créer des univers riches.
Chacun de ces quatre personnages a en effet une filmographie complète. Ce sont de vrais auteurs avant d’être des faiseurs, ce qui a pu poser des problèmes de compréhension avec la production par moments.
Pour cette semaine consacrée à Alien, nous vous proposons donc un portrait des quatre hommes qui ont forgé la saga.
1
- Ridley Scott
2
- James Cameron
3
- David Fincher
4
- Jean-Pierre Jeunet
5
- Conclusion
1.
| Ridley Scott
Réalisateur britannique, Ridley Scott dispose d’une filmographie riche et variée. Passant du film de science-fiction pur et dur au cinéma inspiré de l’horreur puis au blockbuster historique, le frère de Tony Scott a mis un point d’orgue à créer un univers varié et empreint de mysticisme - à quelques rares exceptions.
Le réalisateur explose sa popularité dès son second filmen 1979 : Alien, le Huitième Passager. Comme expliqué dans l’édito de l’ami AlexLeCoq, le film est un succès immédiat et explose les records ouvrant grandes les portes d’Hollywood au réalisateur.
Il enchainera par la suite plusieurs succès critiques et commerciaux de Blade Runner à 1492 en passant par Gladiator ou American Gangster.
Comme dit plus haut, si les univers de ses films sont généralement différents, le réalisateur sait passer d’un genre à l’autre assez facilement, tous ses films sont très travaillés esthétiquement parlant. Connu pour envisager l’image de ses films comme des peintures, le réalisateur d'Exodus a également une forte propension à traiter de la corruption et de la rédemption dans la plupart de ses films, notions fortement ancrées dans la religion judéo chrétienne.
Mais c’est avec Prometheus, sorti en 2012 que le réalisateur marque réellement l’influence de la religion dans son cinéma. Dans ce dernier, tout est écrit autour d’un seul et unique thème : celui de la recherche de son créateur. Alors certes, Prometheus et Alien : Covenant sont dispensables à bien des égards, mais force est de constater que ceux-ci restent cohérents avec les thématiques chéries par le réalisateur.
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2.
| James Cameron
James Cameron est le réalisateur du second film de la franchise Alien, Aliens : Le Retour. Très rare depuis quelques années, chacun de ses nouveaux films est un événement mondial et un énorme succès commercial. Pouvant passer de films de science-fiction tels que Abyss ou Terminator à des productions qui deviendront parmi les plus gros succès du cinéma tels que Titanic et Avatar, le réalisateur ne lésine jamais sur les moyens pour donner vie à ses idées.
Fou d’effets spéciaux, il a été notamment à l’origine des effets visuels de New York 1997 de John Carpenter et ses productions sont à chaque fois de nouvelles prouesses techniques. Il le prouve avec cette suite du premier Alien, en multipliant les astuces afin de montrer de nombreux xénomorphes et une colonie dévastée. Il participe à l’élaboration de techniques de trucages ingénieuses avec son équipe pour rendre réalistes des scènes clés du film. Il va même jusqu’à créer des maquettes du vaisseau Sulaco et à créer physiquement le nid de la reine Alien afin d’obtenir les scènes les plus parfaites visuellement. Il utilise également de nombreux animatroniques, en particulier sur les scènes nécessitant l’intervention des fameux facehuggers.
En somme, le cinéma de James Cameron est généralement toujours à la pointe de la technologie et le réalisateur sait s’en servir afin d’appuyer son sous-texte. Car s’il est réalisateur et producteur de ses films, il est à noter qu’il est également scénariste sur la plupart d’entre eux et ses longs métrages ont tous une seconde lecture.
En effet, si Avatar est une relecture de l’histoire de la conquête de l’Amérique par les colons, que Titanic est un film d’amour sous couvert de lutte des classes au début du 20ème siècle, son Alien peut être mis en relation avec les événements de la guerre du Viêt Nam. Des marines surentraînés et beaucoup trop confiants en leurs capacités qui se feront dévaster par un ennemi qu’ils ne comprennent pas.
James Cameron a un regard lucide sur l’histoire qui a façonné son continent (le bonhomme est canadien) et c’est en parti ce qui fait la réussite de son cinéma auprès du grand public. Avec des films accessibles à tous, le réalisateur arrive à faire passer des idées et des concepts forts.
On espère qu'il ne se perdra pas sur la fin (probable, le réalisateur va sur ses 63 ans et a des plans de tournages jusqu’en 2025) de sa carrière en multipliant les suites de son dernier succès, Avatar.
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3.
| David Fincher
Réalisateur prodige, David Fincher a débuté sa carrière chez ILM sur des films comme Star Wars VI ou Indiana Jones et le Temple Maudit. Il commence par la suite la réalisation de plusieurs projets de publicités et de clips musicaux notamment pour Michael Jackson, Madonna ou les Rolling Stones. Son univers léché est très esthétique et il est immédiatement repéré par les producteurs de la FOX pour prendre la suite de Ridley Scott et James Cameron sur la troisième aventure d’Ellen Ripley. Projet maudit, sur lequel reviennent Republ33K, Djé, Manu et Strafeur lors du podcast spécial Alien, Fincher se brouille avec la production avant le montage du film et n’obtiendra par conséquent jamais le final cut de son premier long métrage.
Il y développe pourtant déjà un esthétisme et des thématiques que l’on retrouvera dans ses prochains films : l’obsession et l’aliénation mentale. Il est également le premier réalisateur à utiliser des images de synthèses dans la saga Alien.
Comme dit précédemment, David Fincher est un esthète de la réalisation. À l’instar de Stanley Kubrick, le réalisateur est capable de tourner une même scène plus de 90 fois pour obtenir la prise parfaite. Son univers visuel est par conséquent très marqué, avec la plupart du temps une photographie froide, en accord avec les thématiques de prédilection du réalisateur. Ici, la mise en scène sert le propos de la narration afin d’exorciser les obsessions du réalisateur. C’est avec les mouvements de caméras et la composition de l’espace que Fincher renforce sa narration, le dialogue avec son spectateur et sans inserts ou de gros plans, généralement utilisés comme cache-misère par certains de ses collègues contemporains.
De Seven à Millenium en passant par le prodigieux Zodiac, David Fincher n’a eu de cesse de proposer des oeuvres personnelles, parfois dérangeantes et à la limite du nihilisme par moment. Chacun de ses nouveaux films crée la sensation et on attend de pied ferme son retour derrière la caméra pour le second volet de World War Z récemment annoncé.
Il est d’ailleurs assez étrange de le voir revenir dans la suite d’un blockbuster après son expérience ratée sur Alien 3.
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4.
| Jean-Pierre Jeunet
Ovni dans ce casting de réalisateurs, le seul français de la sélection s’est illustré grâce à des films dégageant une imagerie très forte et une narration empreinte du conte pour enfant. C’est après avoir sorti La Cité des Enfants Perdus (en partenariat avec son ami Marc Caro) que le réalisateur a été repéré par les producteurs de la FOX. Lors de la négociation de son contrat, le réalisateur arrive à incruster Pitof (à qui l’on doit Catwoman) pour la création des effets visuels et Darius Khondji (Chef opérateur) avec qui il a travaillé sur son précédent film.
C’est donc fort de son équipe habituelle et d’un scénario écrit par Joss Whedon que le réalisateur débarque à Hollywood alors qu’il vient tout juste de terminer le script de ce qui deviendra son premier succès planétaire : Le Fabuleux Destin d’Amélie Poulain.
Malgré la réunion de tous ces éléments (et la présence de son ami Dominique Pinon au générique), Alien La Résurrection apparaît comme une anomalie dans la filmographie du réalisateur. Jeunet y est comme prisonnier des carcans hollywoodiens et n’impose pas réellement le style visuel qui caractérise ses créations. On retrouve les contre-plongées ainsi que les filtres verts et jaunes qui composent ses films, mais généralement ces “effets de style” sont au service du message que le réalisateur tente de faire. Ici, Jeunet n’est pas libre dans sa création et doit faire face à un cahier des charges qu’il doit respecter à la lettre.
Heureusement pour lui, le film connaît un succès, certes relatif, qui lui permet de monter facilement le projet qui lui tenait tant à coeur : Amélie Poulain. Grâce à ce long métrage, Jeunet devient, durant un temps, un réalisateur sur qui l’on peut compter et qui, avec François Ozon et Cédric Klapisch, formera une sorte de nouvelle vague dans le paysage cinématographique français.
Suite à ce succès, le français a été une nouvelle fois courtisé par Hollywood et son nom a été rapproché de projets tels que Harry Potter et la chambre des secrets ou encore L’odyssée de Pi.
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5.
| Conclusion
Si Alien est une saga culte, c’est en partie grâce à l’audace de la Fox d’avoir choisi des réalisateurs avec une réelle personnalité. Mais est-ce une si bonne idée ? Là où d’autres arrivent à garder une cohérence avec un unique réalisateur à la tête des projets, Alien offre une saga “monstre” très proche de la créature de Frankenstein et c’est peut être là où se trouve son charme.
Mais est-ce réellement pertinent de laisser Ridley Scott revenir sur cette franchise pour s'approprier une oeuvre qui n’a historiquement pas besoin d’une seule et unique personne à sa tête pour exister ?