Jugé trop complexe ou trop risqué pour une exploitation au cinéma sur l'ensemble des territoires, Annihilation aura pointé du doigt sans le vouloir un énième symptôme de certaines mentalités rouillées à Hollywood.
Adaptation du roman éponyme de James Vandermeer, Annihilation aurait pu ou du être le second film à placer Alex Garland sur la voie des cinéastes à suivre après une première (belle) réussite avec Ex Machina. Problème, le réalisateur aura l'intelligence de se placer sous la production inébranlable de Scott Rudin, vestige d'un modèle de collaboration harmonieuse entre metteurs en scène et producteurs.
Lorsque la Paramount, estimant le métrage trop compliqué pour le grand public, aura exigé des réécritures, Rudin choisit de défendre Garland et de ne rien toucher. Le studio réagit en décidant de minimiser les risques, ne distribuant officiellement le film que dans les salles nord-américaines et chinoises.
En attendant de savoir si Paramount France compte tout de même proposer une sortie sur le grand écran, Alex Garland avoue de son côté une certaine douleur à voir son film privé de projections au cinéma. Non pas que la télévision le rebute - seulement, ça n'a jamais été l'optique visée.
"Je suis réellement déçu. Nous avons fait ce film pour le cinéma. Je n'ai aucun problème avec le petit écran, pas du tout. L'une des meilleures créations de genre que j'ai vu depuis longtemps a été The Handmaid's Tale, donc je vois le potentiel incroyable de ce medium, mais si vous visez la télévision, vous faites quelque chose de pensé pour la télévision, et vous le pensez en ces termes.
Ecoutez... C'est comme ça. Le film aura droit à une distribution au cinéma aux Etats-Unis, et j'en suis très content. L'un des avantages de Netflix est que beaucoup de gens y ont accès, et vous n'avez pas cette étrangeté du truc du weekend d'ouverture, où vous vous demandez si les gens vont se pointer, et si ce n'est pas le cas, le film disparaît de l'affiche au bout de deux semaines. Donc il y a des pour et des contre, mais de mon point de vue, du point de vue collectif des gens qui ont travaillé dessus, ça a été pensé pour le cinéma."
Toujours prévu pour le 7 mars chez nous, Annihilation devrait imposer un précédent selon son succès sur la plateforme de streaming, qui pourrait à terme récupérer tout ce que le cinéma hollywoodien juge trop risqué ou trop peu rentable - soit une armée entière de films sacrifiés, malheureusement, au profit de logiques de reshoots et de réécritures constantes.