DossiersDossier – Fondation, la série : une adaptation moderne...
Scifi Séries
Dossier – Fondation, la série : une adaptation moderne et réussie d'un monument de la science-fiction
Par Richard Lecastor
6 min
11 décembre 2021
1
- De quoi ca parle ?
2
- une adaptation réussie d’une œuvre complexe
3
- une modernisation de l’œuvre qui pourrait décevoir les puristes (spoiler)
1.
| De quoi ca parle ?
Isaac Asimov est un auteur américain d’origine russe a qui l’ont doit deux des plus grandes œuvres de la science-fiction : le cycle des robots et le cycle de Fondation. Initialement publié sous la forme de 5 nouvelles dès 1940, il les publia dans le 1er tome de Fondation en 1951, suivie des tomes 2 et 3 publiés de 1952 à 1953. Enfin en près de 40 ans, il publiera 4 nouveaux romans, pour donner un préquelle et une fin à son œuvre. Lauréats de nombreux prix dont un prix Hugo exceptionnel, le cycle de Fondation reste à ce jour l’une des meilleures séries de science-fiction de tous les temps.
L’histoire se situe au sein d’un immense empire galactique près de 20 000 ans après notre ère. Cet empire regroupe 25 millions de mondes habités, et sa capitale est Trantor, une planète entièrement recouverte de dômes en métal. Hari Seldon, un brillant mathématicien y invente une science statistique appelée : la psychohistoire et prédit la chute de l’empire, suivie de 30 000 ans de barbarie jusqu’à l’avènement d'un nouvel empire. Afin de réduire la période de barbarie à 1 000 ans, il suggère la création d’une Fondation dont le rôle sera de rassembler le savoir de toute l'humanité dans une encyclopédie. Cependant en privé, Hari Seldon crée une Seconde Fondation qui épaulera secrètement la première via l’utilisation de la psychohistoire.
Le cycle raconte à travers plusieurs personnages la création de la fondation, son évolution et la chute de l’empire. Ainsi, isolée aux confins de l’espace, la fondation est une petite colonie de savants cernée par des mondes barbares, une île où subsiste le savoir au milieu d’un océan dont les confins reculent chaque jour et où l’on ne connaît que des formes d’énergie plus rudimentaire. C’est donc par la connaissance et la technologie que la fondation prendra son essor sur ses voisins en traversant plusieurs grandes crises qui ont été prédites par la psychohistoire et rassemblées au sein du plan Seldon. Pas à pas, la nouvelle fondation créera les bases d’un nouvel empire jusqu’à l’avènement d’un événement inattendu et imprévu dans le plan Seldon : l’apparition d’un mutant appelé le mulet.
Chapitre Suivant
2.
| une adaptation réussie d’une œuvre complexe
Près de 60 ans après sa parution, personne n’avait osé adapter Fondation. Jugé trop complexe, d’une part par manque de moyen financier et d’autres parts par la longueur de l’œuvre. L’histoire se déroule sur près de 500 ans, avec de nombreux personnages ainsi que des sauts temporels de près de 50 ans. En septembre 2021, parait sur Apple TV, l’adaptation en série du cycle de Fondation : Foundation, un choix de format astucieux qui pourrait donner à cette œuvre tout son potentiel.
A la réalisation des épisodes, on retrouve les scénaristes David S. Goyer (Batman Begins, The Dark Knight) et Josh Friedman (La Guerre des mondes, Snowpiercer), ainsi que la fille de l’auteur Robyn Asimov. Apple a mis les moyens avec un budget de près de 45 millions de dollars pour les 10 premiers épisodes diffusés en 4K sur la plateforme Apple TV+. Le rendu visuel est magnifique, avec des effets spéciaux et une photographie rarement égalés pour une série. De nombreuses scènes d’actions ainsi qu’a des retournements de situation ont été rajoutés au récit, donnant un rythme irrégulier mais pas déplaisant à la série. Le casting est assez impressionnant avec Jarred Haris (Sherlock Holmes, Chernobyl) dans le rôle d’Harry Seldon l’inventeur de la psychohistoire, Lee Pace (Le Hobbit, les gardiens de la galaxie) dans celui de l’empereur Cléon et enfin la révélation de cette série Keah Harvey, la gardienne de terminus. Personnellement j’ai eu un énorme coup de cœur pour le premier et le dernier épisode, on y découvre énormément de clins d’œil à l’œuvre complète. Ainsi nous découvrons les planètes de Terminus et la planète aquatique de Synnax ainsi que l’ascenseur spatial de la planète-capitale Trantor. Dès le début du premier épisode, la voix off présente également les différents antagonistes du roman, Harry Seldon, Salvor Hardin et le mulet. Le dernier épisode se conclut avec la résolution d’un crise et l’apparition prophétique d’Harry Seldon.
Chapitre Précédent
Chapitre Suivant
3.
| une modernisation de l’œuvre qui pourrait décevoir les puristes (spoiler)
Ecrite en 1940 sous la forme initiale de plusieurs nouvelles, les premiers tomes de Fondation ne faisaient pas beaucoup de place aux femmes ainsi qu’à la diversité ethnique. Ainsi, certains personnages principaux sont devenus des femmes et d’autres « ont changé d’ethnie », rendant à l’œuvre une vision plus moderne et plus en adéquation avec notre société. Ces ajouts ne dénaturent en rien le récit et sont même judicieux dans le cas de Gaal Dornick, de Salvor Hardin et d’Eto Demerzel. De plus, l’œuvre à grandement était simplifié, avec des arcs narratifs soit supprimés soit fusionnés. L’un des ajouts majeurs de l’œuvre est la représentation de l’empereur Cléon. Ainsi dans le roman, l’empire galactique est décrit comme mourant depuis des millénaires et devenu ingouvernable à cause d’une administration trop complexe. C’est à travers le clonage perpétuel du 1er empereur Cléon que la stagnation de l’empire est représentée, ses clones sont conçus pour n’être que de parfaites copies. Ainsi, on retrouve non pas 1 mais trois empereurs totipotents réveillés à des âges différents gouvernant tel un triumvirat : le frère au matin, le frère au grand jour et le frère au soir.
Qui dit modernisation dit un certain éloignement avec l’œuvre originale et pour sûr cela en décevra certains. Ainsi, le développement de certains personnages ou trames narratives deviennent superflus et inutiles à la série, par exemple le cas de Terminus. Personnellement, Il y a deux points majeurs que je n’ai pas appréciés dans cette adaptation, premièrement le personnage d’Harry Seldon (Jarred Harris) qui est secondaire dans la série et son invention la psychohistoire est trop peu abordée, c’est pourtant la pierre angulaire permettant la construction de la Fondation et la prédiction des grandes crises.
Le personnage de Demerzel (Laura Birn) pourrait, selon moi, être la plus grande offense faite à l’œuvre. Initialement un allié d’Harry Seldon dans le roman, nous apprenons malheureusement rapidement qu’il s’agit d’un robot avec un dessein bien particulier. Dans cette première saison, la série prend ses distances avec l’histoire de ce personnage, aux travers de ses actions que certains pourraient juger comme moi : en inadéquation avec les lois de la robotique. Isaac Asimov a toujours eu une vision de la robotique bienveillante, un robot ne peut nuire à l’homme. Il a ainsi créé, les 3 lois de la robotique :
Un robot ne peut porter atteinte à un être humain ni, restant passif, permettre qu’un être humain soit exposé au danger.
Un robot doit obéir aux ordres que lui donne un être humain, sauf si de tels ordres entrent en conflit avec la Première loi.
Un robot doit protéger son existence tant que cette protection n’entre pas en conflit avec la Première ou la Deuxième loi.
Plus tard, l’auteur ajoutera une nuance avec la loi zéro : « un robot ne peut pas faire de mal à l'humanité, ni, par son inaction, permettre que l'humanité soit blessée ». La série ayant ajouté la foi en la religion chez Demerzel, ainsi qu’une remise en question perpétuelle sur ses actions, elle le fera peut-être évoluer vers son véritable rôle avec une prise de conscience bien humaine…
Ces écarts ne devraient pas poser de problèmes aux néophytes découvrant l’œuvre mais devraient cependant refroidir quelques peu les puristes. C’est donc sur ce point d’équilibre que nous concluons ce dossier, pour sûr, nous reparlerons de la série Foundation : puisqu’elle a été renouvelée pour une deuxième saison. La série s’émancipera-t-elle complètement de l’œuvre initiale ou reviendra vers un développement plus proche des attentes des puristes et du roman ? réponses en fin 2022 – début 2023. Une chose est sûre, en 2022, les ventes des romans d’Isaac Asimov devraient augmenter.