Pour des créatures vieilles de plusieurs millions d'années, les dinosaures se portent très bien au box-office. Preuve en est faite avec le démarrage record, et pour le moment historique, de Jurassic World au box-office. Une charge de reptiles que rien ne semble pouvoir arrêter, et qui mine de rien, était peut-être prévisible, car le film de Colin Trevorrow aligne bien des étoiles qui le mèneront assurément vers le succès le plus colossal.
Malgré mon scepticisme envers le film de Colin Trevorrow, son démarrage hallucinant méritait bien une petite analyse, que j'ai tenté de découper en plusieurs points.
Une star au sommet
Si de nombreux critiques américains ne manquent jamais une occasion de rappeler que le modèle Marvel Studios, dont est issu Chris Pratt d'ailleurs, participe à la dévalorisation des stars sur le marché des films Hollywoodiens - puisque des franchises comme Thor ou Captain America, voire Iron Man se sont basés sur des acteurs méconnus - l'exemple Jurassic World nous prouve le contraire. Peu d'acteurs peuvent se dire aussi bankable, à l'heure actuelle, que Chris Pratt. D'ailleurs, en y réfléchissant bien, seul Dwayne Johnson et son charisme colossal arrivent à rivaliser avec la popularité du héros de Guardians of the Galaxy en 2015.
Star hollywoodienne récente mais en pleine ascension, Chris Pratt était donc la bonne pioche pour Universal. Le studio avait de toute évidence senti la vague monter lorsqu'il s'était penché sur la candidature de Pratt, annoncé comme le remplaçant de Josh Brolin en janvier 2014. Une popularité en devenir qui n'a fait que grandir avec l'écrasant succès de Guardians of the Galaxy, qui a battu le fer pour Jurassic World : moins d'un an après la sortie du film de James Gunn, Colin Trevorrow transforme l'essai en capitalisant sur la sympathie universelle - avez-vous déjà rencontré quelqu'un qui n'aimait pas Chris Pratt ? - du bonhomme. Tout juste âgé de 35 ans, l'acteur est devenu une star qui ne risque pas de disparaître de nos écrans de si tôt (Cowboy Ninja Viking, The Magnificent Seven et peut-être même Indiana Jones) et qui est ici en plein âge d'or, pas encore entaché par une casserole qui finira, le modèle Hollywoodien est ainsi, par arriver.
Tous pays, tous supports
Aux dernières nouvelles, Jurassic World a déjà rassemblé près de 511 millions de dollars au box-office mondial. Un score proprement hallucinant qui devrait logiquement amener le film vers son milliard, ne serait-ce que par effet d'annonce. Lorsqu'un succès monstre est ainsi annoncé, les rares spectateurs n'ayant pas découvert le film se précipitent le plus souvent en salles, créant un effet boule de neige apte à décuplé les scores d'un métrage. Mais d'ici à ce que cet effet se déclenche, Universal a déjà conçu son plan de bataille parfait.
Le film est sorti, à peu de choses près - nous l'avons eu le 10 juin, les américains le 12 - dans 66 pays différents pour son ouverture. Y compris la Chine, client hyper-demandeur en blockbusters hollywoodiens, qui doit généralement attendre quelques semaines de plus avant la sortie de telles productions. En appliquant à la lettre l'adage "prend l'oseille et tire-toi", Jurassic World a raflé des millions à travers plus de soixante pays. Un lancement international décuplé par la diffusion du film de Colin Trevorrow dans plusieurs formats, dont la 3D ou l'IMAX et leurs onéreux tickets, permettant de gonfler les chiffres.
La victoire dans les gènes
Revenons maintenant dans le passé, avec Jurassic Park premier du nom. Vingt-deux ans après sa sortie en salle, le film de Spielberg est toujours un fier gladiateur de l'arène sans pitié du box-office. En 1993, il devenait le plus gros succès de l'histoire du cinéma, et ses recettes, qui dépassent le milliard de dollars, le placent encore aujourd'hui en dix-septième position du box-office all-time. Pas mal quand on sait que la plupart de ses concurrents sont sortis entre 2010 et 2015 !
Mais à l'époque, Universal avait déjà biberonné le succès du film avec une campagne de promotion qui dépassait les 60 millions de dollars (une dépense tout simplement dingue pour les 90's), et le studio n'a fait que réinjecter cette technique pour la sortie de Jurassic World, copieusement arrosée de spots TV (une trentaine, tout de même) d'affiches et d'opérations promotionnelles en tous genre.
Une nostalgie bankable ?
C'est peut-être l'argument le plus hasardeux, ou en tous cas le plus difficile à mesurer, de cette liste. La nostalgie a-t-elle décuplé le score de Jurassic World au box-office ? On peut imaginer que oui. Tout d'abord, car si Jurassic Park a réussi à engendrer deux suites, aucune n'a jamais su égaler l'original, tant sur le plan économique que critique. Jurassic Park III est déjà battu à plate couture par le score de son successeur. Et d'ici 100 millions de dollars, ce sera aussi le cas de The Lost World. Une certaine revanche de la part des fans qui attendaient enfin une suite digne de ce nom ? Je ne partage pas cet avis, mais il faut effectivement le prendre en compte.
A retenir également, si Jurassic Park a lancé une dinosaure-mania dans la tête des gosses dans les années 1990, aucun studio n'avait eu l'idée de se lancer dans des films mettant spécifiquement en scène des dinosaures. Ce qui serait sans doute le cas si le premier film sortait de nos jours. Du coup, en dehors de ces deux suites contestées, le public, pourtant passionné par les dinos, n'a jamais eu sa dose, pour ainsi dire. Et justice est enfin rendue, depuis la semaine dernière.
S'il faut bien garder en tête tous les formats qui font gonfler les statistiques, Jurassic World est déjà un énorme succès. Une victoire presque insolente au box-office, quand on voit des blockbusters bien vendus et bien construits comme Mad Max : Fury Road lutter pour se rembourser, qui peut également s'expliquer par la mort lente d'Avengers : Age of Ultron au box-office. En attendant Star Wars : The Force Awakens, vous tenez donc ici l'un des plus gros poids lourds de l'année. Mérite-t-il sa place ? C'est une autre histoire qui implique sans doute la théorie du Chaos de Ian Malcom. Et après tout, Transformers 4 est bien le plus gros succès de l'année dernière.