Alors qu'il y a quelques mois à peine résonnait encore l'échec de l'arlésienne Titan, le "Nouveau Blizzard" se préparait en coulisses. Son secret ? S'appuyer sur les succès d'un jeu de cartes développé par une dizaine de personnes et longuement raillé, avant de lancer dans le grand bain son MOBA maison, sur lequel s'écharpaient les équipes du studio depuis quelques mois. Son nom, Heroes of the Storm. Son but, devenir le premier MOBA sur un marché largement occupé par League of Legends (70 millions de joueurs) et reprendre la main sur un genre né comme un mod de Warcraft 3, faut-il le rappeler.
Et si nous avons déjà disserté sur le triomphe d'HearthStone et ses 20 millions de joueurs à maintes reprises (à l'heure où le jeu reprend d'ailleurs énormément d'intérêt grâce à l'extension du Mont Rochenoire, après un Goblins VS Gnomes un peu trop radical), ce premier juin est forcément tourné vers Heroes of the Storm, alors que les préparatifs de la grande soirée de lancement Londonienne sont désormais terminés, prêts à être streamés dans le monde entier à partir de 21H30 (heure française). Pour la petite anecdote, nous devions nous rendre sur place mais un vilain problème de trésorerie nous a empêché de nous payer l'A/R entre Nantes et l'Angleterre, tandis qu'un nantais ô combien plus connu nous remplace avec classe, puisque Madeon clôturera la soirée d'un DJ set dont il a le secret.
World of Warcraft mis à mal et les yeux tournés vers RIOT et son succès colossal dans l'e-sport et en Corée du Sud, où brille toujours autant l'inusable Starcraft 2 (qui vivra d'ailleurs sa dernière extension cet été avec Legacy of the Void), Blizzard cherchait une nouvelle mine d'or dans l'impitoyable univers des jeux en ligne, et a su vite comprendre que l'oasis dans ce qui semblait être un désert d'inspiration était sous leur nez depuis le départ, la société d'Irvine étant presque dépositaire de ce concept depuis Diablo et Warcraft : le Meta-Game.
Fluctuant à mesure que les joueurs jouent et que les développeurs développent, le principe d'un jeu basé sur "sa meta" permet de forcer sa communauté à rester s'amuser toujours un peu plus. Une communauté invitée à découvrir de nouveaux éléments, à évoluer avec les (r)évolutions de celle-ci et à prendre part à un monde à part entière, ironiquement presque plus organique que les grandes contrées désertiques d'un MMORPG.
Accueilli comme un MOBA parmi tant d'autres lors de son annonce après un E3 rempli à ras-bords de Tower Defense, Heroes of the Storm possède un atout indéniable aux yeux de ces studios qui rêvent d'adaptations de licences connues : des héros aimés par tous, joués par des communautés entières pendant des années, qui se retrouvent dans un best-of du studio, aussi bien dans le design que dans son gameplay, supplanté par cette uniformisation Blizzard qui n'est qu'une marque de fabrique, parmi tant d'autres, du studio de Chris Metzen et Samwise. Ainsi, ce qui n'était qu'une vague annonce un peu nébuleuse pour le futur de Blizzard (qui se conjugue avec Overwatch, prochain phénomène du studio qui s'appuie chaque jour sur le développement de Heroes of the Storm et de son approche du genre) est vite devenu une curiosité pour énormément de joueurs invités à prendre part à l'Apha-test du jeu, vite conquis par un titre à l'approche graphique aussi efficace que belle et généreuse, qui se permet de surcroît de proposer une petite révolution dans l'univers des MOBA en plaçant le teamplay à un degré supérieur et la multiplicité des cartes au coeur de son gameplay.
Cynique, je l'étais autant que peuvent l'être les joueurs de League of Legends ou DOTA 2 à propos d'un jeu qu'ils trouvent trop simple (qu'ils ne cherchent pas à comprendre et qui ne repose définitivement pas sur les mêmes mécaniques, mais passons), pour bien d'autres raisons. En effet, le Free 2 Play, très peu pour moi. Repoussé par les logiques de Pay 2 Win, je déserte bien souvent ces modèles pour me tourner vers des expériences qui m'apparaissent plus honnêtes. Que j'étais innocent. Parfaitement rôdé pour amener les joueurs à jouer gratuitement plusieurs héros, le jeu propose une rotation de personnages gratuits chaque semaine pour mieux vous aider à trouver celui qui vous correspondra, celui avec qui vous vous lancerez dans l'arène à la conquête du Nexus adverse. Un personnage chéri, que vous pourrez ensuite customiser à grands coups de skins payants (avec de vrais euros), que les plus économes habilleront d'un Master Skin, son Cell 4ème transformation, ultime et accessible après avoir accumulé l'expérience d'une centaine de parties et contre 10 000 pièces d'or. Une somme conséquente, si l'on considère qu'une partie (gagnée) de 25 minutes tout compris ne vous rapporte que 30 P.O. Mais c'est comme ça que cela fonctionne. Et tant mieux, parce que tout le monde en redemande !
À l'image d'un certain film de Doug Liman, Heroes of the Storm vous invite à Vivre, à Mourir, puis à Recommencer. Pas question de jeter les armes, ni même d'espérer vous sortir d'un cycle basé sur la compétition la plus pure : chaque partie vous propose de repartir au premier niveau pour mieux sauter à la gorge de vos adversaires, avant bien sûr d'avoir joué suffisamment de parties pour savoir découper les temps forts d'une "game" et d'optimiser vos "builds" et autres "team-ups" en fonction de vos amis et de vos adversaires. Car c'est aussi une grande force de Heroes of the Storm : savoir ramener de nouveaux joueurs dans la grande famille des MOBAs. Des nouveaux joueurs qui pourront enfin échanger à grands coups de claviers avec leurs potes qui leur parlaient de League of Legends depuis des années. Sauf que cette fois, vous pouvez jouer Diablo. Et Nova. Et Zeratul. Et Thrall. Et pourquoi pas les Lost Vikings ? Bref, autant de personnages de légendes pour ceux qui, comme moi, ont grandi avec les licences de Blizzard.
Il est même rigolo de constater que la communauté déjà réunie lors de l'Alpha du jeu (en fonctionnement depuis près d'un an maintenant), qui subissait les railleries des "LoLeurs" et autres "DOTiens", était déjà bien consciente d'être assise sur un tas d'or avec Heroes of the Storm. À grand renfort de nouveaux héros (un toutes les six semaines), de nouvelles maps et d'une méta qui bouge constamment, en plus d'une scène E-Sport que n'ont pas manqué de s'accaparer les géants du genre que sont Na'Vi, Liquid, G2 et j'en passe, HOTS est devenu en quelques mois l'un des jeux les plus joués au monde. C'est sans parler de la couverture médiatique impeccable sur Twitch, ou Millenium (que je vous conseille vivement) et HeroesOne (qui a le mérite d'être "officiel") qui se partagent le gâteau avant de voir arriver quelques prétendants, tels qu'Eclypsia dans un premier temps, avant peut-être qu'O'Gaming (❤) ne consacre elle aussi une chaîne au MOBA phare de Blizzard. Et vous savez quoi ? Heroes of the Storm sort demain, et l'on parle d'un jeu qui compte déjà plusieurs millions de parties jouées, de compétitions officielles ultra-disputées, de soirées à n'en plus dormir etc.
Vous ne rêvez pas, ce jeu qui tourne depuis des mois et dont vous entendez forcément parler à droite à gauche n'est pas encore lancé et c'est aujourd'hui son dernier jour de Bêta (ouverte) qui se poursuit. Fini l'adolescence, place à l'âge adulte, avec une formule taillée sur mesure pour les différents types de joueurs : inscription gratuite avant de se lancer, ou pack à 20€ pour être sûr de partir équipé, vous voilà devant un choix cornélien. Pas celui de savoir si le jeu vaut ce prix (1400 parties plus tard, je pense qu'il aurait été rentabilisé), mais bel et bien de savoir si vous saurez résister chaque soir à l'appel de "la petite dernière".
Quelques infos clés sur Heroes of the Storm :
• Dans Heroes of the Storm, les héros d'une équipe partagent l'expérience et passent les niveaux au même moment. C'est un détail, mais cela change déjà énormément de situations en team-fights, qui peuvent se retourner grâce à une tour tombée à l'autre bout de la map par un personnage qui aura splité.
• Oubliez les placements préconçus en début de partie, Heroes offre la possibilité aux héros de choisir la ligne qu'ils veulent, de roamer à leur convenance, d'éviter un personnage counter-pick et j'en passe. La liberté, c'est bien aussi.
• Pas de stuff dans Heroes of the Storm. Quatre skills (et plus) et la qualité de votre placement, c'est tout ce que vous aurez pour vous battre. Oui, ça paraît plus dépouillé, mais ça n'en est que finalement tout aussi riche !
• Preuve que Blizzard croit dur comme fer en son jeu, une ligne de produits dérivés à été annoncée, là où Starcraft se contente encore de quelques figurines tournées vers le luxe, sans parler de Diablo qui découvrira enfin le monde des action figures.
• Blizzard vient d'offrir la possibilité de jouer sur des serveurs internationaux, pour ne pas limiter vos envies à un seul continent. À vous de voir si vous voulez vraiment jouer face à un rang 1 Coréen.
• Preuve de son accueil chaleureux auprès des jeunes communautés, Blizzard a organisé une ligue universitaire de Heroes of the Storm il y a quelques mois, remportée par la très prestigieuse école de Berkley. On les imagine parfaitement, côte à côte dans leur école réservée à l'élite en train de hurler "CAREFUL, VALLA FLANKING !".
• Plus fou encore, Blizzard vient d'annoncer une compétition mondiale de Heroes of the Storm (qui se déroulera globalement en opens), avec un million de dollars à la clé, invités à la Blizzcon. Vous ne rêvez pas.
• Et puisque je sais que cet édito aura achevé de vous convaincre d'au moins prendre une heure pour essayer le jeu, sachez qu'un bonus d'XP est offert à tous les joueurs à partir de minuit ce soir. De quoi farmer vos héros tranquillement. Conseil maison : commencez à des héros simples à aborder, tels que Raynor, Valla, Nova, LiLi ou Muradin, vous n'en deviendrez que plus efficaces. Et "focusez le carry, pas le tank putain".