The Banner Saga est un voyage qui s’étale sur trois jeux. Il n’en fallait pas moins pour déployer cette fable aux multiples possibilités, inspirée par la mythologie scandinave. Un véritable souffle épique habite le scénario du jeu, pas étonnant lorsqu’on sait que les développeurs de chez Stoic sont des anciens de Bioware (Jade Empire, Mass Effect…), habitués des récits puissants et profonds.
Une ambiance forte, qui contribue à un univers visuel léché
Entièrement réalisés à la main, les graphismes sont l’œuvre de Arnie Jorgensen et s’inspirent du travail d’Eyvind Earle (connu, notamment, pour avoir réalisé le dessin animé La Belle au bois dormant, chez Disney).
Une bannière pour se souvenir
Dans Banner Saga, les clans humains partagent une tradition : chacun tisse sa bannière, aussi longue que l’histoire du clan lui-même. Elle est enrichie des naissances, des imprévus, des batailles, des victoires et des morts… Le récit de certaines bannières débute à l’époque de la guerre entre les hommes et les Varls, de puissants géants cornus. Les clans qui y ont survécu ont cousu sur la leur la paix que les deux peuples ont réussi à trouver. Car ils ont dû s’unir pour repousser les armées de Dredge (inspirés par les draugars de la mythologie nordique), des créatures de pierre qui ont plusieurs fois quitté leur royaume souterrain pour tenter d’envahir le monde.
Pour Rook et sa fille Alette, un nouveau chapitre se tisse après la mort des Dieux, lorsque le soleil s’immobilise dans le ciel, mettant fin au cycle du jour et de la nuit. Comme si ce signe funeste ne suffisait pas, le sol se met à trembler et les Dredges ont de nouveau quitté leurs cavernes pour se répandre sur le monde. L’alliance entre Varls et humains est fragile, minée par les conflits raciaux, pourtant, ils vont de nouveau devoir faire front ensemble s’ils veulent survivre au cataclysme qui approche. C’est un très long voyage qui attend la caravane qui se lance en direction de l’ouest, à la fois pour fuir l’armée de Dredges et pour trouver un refuge.
Un voyage mortel
Banner Saga propose au joueur de déplacer la caravane de survivants menée par Rook et Alette au rythme d’événements aléatoires, qui peuvent s’avérer aussi dramatiques que bienheureux. Chaque rencontre, chaque péripétie demandera de faire des choix dont les conséquences influeront sur l’aventure. Parfois même dans le jeu suivant, puisque The Banner Saga est une trilogie. Il convient donc de bien peser chaque décision et d’en assumer les conséquences.
Pour autant, le jeu n’est pas uniquement narratif. Certaines rencontres déclencheront de fabuleux combats tactiques, qui mettront à l’épreuve l’astuce des joueurs. Chaque personnage dispose d’une classe (scalde, archer, chasseur, lancier...) et de capacités qui lui sont propres, il faudra donc composer habilement son équipe pour mener de complexes batailles au tour par tour. L'assemblage hétéroclites de personnages permet d'offrir une grande pluralité de talents, depuis la force des Varls jusqu'au sorts de soin des magniens, de puissants mages.
Les ennemis aussi sont nombreux. Des Dredges bien sûr — qui disposent eux aussi de classes de combattants variés, notamment les terribles Sundrs — , mais également des pillards humains ou Varls et des centaures. Comme les alliances se font et se défont en fonction des événements, l’ami d’un jour pour être l’ennemi du suivant. À l’image de Bolverk, chef des corbeaux, un clan de mercenaires, qui finira par abandonner la caravane pour mener sa quête personnelle.
Dans The Banner Saga, la mort d’un personnage est définitive et l’histoire se poursuit sans lui. Il est même possible, à certains points clés du scénario, de perdre ses héros. S’en est alors un autre qui reprendra la bannière et continuera de guider la caravane vers son but. Face à cela, on retrouve deux écoles de joueurs : ceux qui refusent de perdre le moindre membre quitte à recharger une sauvegarde antérieure des dizaines de fois, et ceux qui acceptent de dire adieu à des protagonistes tous plus charismatiques les uns que les autres. Car la profusion des personnages ne les rend pas interchangeables pour autant : ils ont tous des traits, des désirs et un caractère bien à eux. Des différences avec lesquelles il faudra jongler, quitte à s'improviser juge lors des conflits, afin de maintenir la paix et la cohésion du groupe.
Une saga digne de l’Edda
Comme les grands récits scandinaves dont il s’inspire, The Banner Saga est une épopée grandiose, belle, nourrie de réflexions profondes et de décisions douloureuses. Le jeu est également peuplé de personnages auxquels il est difficile de ne pas s'attacher, et qui possèdent chacun une histoire et des aspirations particulièrements bien écrits.
Chaque partie peut se conclure d’une façon différente, tant les possibilités offertes par le jeu sont grandes. Sorti en 2014, le premier jeu n’a pas pris une ride et l’ensemble de la trilogie est disponible en version physique ou dématérialisée, sur console et PC. Une œuvre que je ne peux que vous inviter à découvrir et dans laquelle je vais me plonger, encore une fois, moi-même.
