- Un livre accessible aux néophytes
- Un ouvrage que les passionnés du genre aimeront
- Des textes choisis avec justesse qui résument bien la mythologie nordique
- Des batailles épiques
- Des Dieux qui nous ressemblent
Quand un auteur connu s'attaque à la réécriture des mythes nordiques, attention aux vagues et aux surprises !
Le résumé
L’univers de Neil Gaiman est nourri par les légendes nordiques. Il revient à ses sources et nous raconte enfin la grande saga des dieux scandinaves qui l’ont inspiré pour son chef d’oeuvre, American Gods. De la genèse des neuf mondes au crépuscule des dieux et l’ère des hommes, ils reprennent vie : Odin, le plus puissant des dieux, sage, courageux et rusé ; Thor, son fils, incroyablement fort mais tumultueux ; Loki fils d’un géant et frère d’Odin, escroc et manipulateur inégalable… Fières, impulsives et passionnées, ces divinités mythiques nous livrent enfin ici leur passionnante – et très humaine – histoire.
Notre avis
Peut-être avez-vous déjà entendu parler des séries télévisées Sandman ou American Gods ? Dans cette dernière, tirée du récit du même nom, des dieux nordiques, entre autres, se battent dans notre monde moderne. Le lien avec cette critique n’est pas très évident, je vous l’accorde ! L’auteur de La mythologie viking, Neil Gaiman, est en fait aussi celui de l’ouvrage American Gods.
Pour écrire son livre, il a effectué de longues recherches sur les mythes nordiques. Ses pérégrinations l’ont amené à résumer ce qu’il a appris dans un recueil d’histoires, toutes plus farfelues les unes que les autres. Ces quinzaines de « contes » mettent en avant des dieux et des légendes que nous croyions familiers et qui, pourtant, vont nous étonner.
Des dieux qui dénotent
Effectivement, nous avons été habitués (séries, films, …) à imaginer le panthéon nordique comme un ensemble de dieux forts, intelligents et puissants. On se rappelle de Thor, le dieu du tonnerre qui peut tout tuer, d’un Loki malfaisant, qui cherche à détruire ses confrères, d’un Odin sage qui voit tout, ou encore d’un Heimdall courageux qui connaît le sens du mot sacrifice.
Les dieux mis en scène dans cet ouvrage restent magiques, toujours entourés d’un halo de puissance incommensurable. Pourtant, ils s’avèrent quelque peu différents…
Un Thor attardé mais drôle
Le Thor dépeint dans cet ouvrage se montre très stupide et peu réfléchi, comme dans les récits mythologiques originels. Il tombe dans nombre de pièges et est très imbu de sa personne. Il se croit surpuissant et joue de sa force à tout va, tuant et déformant tout sur son passage, sans regret, remord ou tristesse. On a du mal à s’y attacher avant d’en rire : il n’est pas très futé et reste surtout attiré par la nourriture ou la boisson, tel un ivrogne benêt.
Thor, comme tous les autres dieux, ne se rend jamais compte que les supercheries, plaisanteries ou manigances dont il est victime prennent leur source dans les agissements mesquins de Loki, un traître haut en couleur, appelé d’ailleurs – à raison – le dieu fourbe. Ce manque de discernement grotesque permet néanmoins la mise en place d’histoires amusantes et culturellement intéressantes (les rituels et cérémonies, les relations hommes-femmes, les organisations dans l’armée, les croyances religieuses,...), surtout pour les passionnés du genre.
Des dieux qui nous ressemblent
Il est étonnant de constater que de tels dieux s’avèrent autant aimés par les foules. Ce sont en fait leurs défauts et leurs actes irréfléchis qui donnent du piment à leur folklore et qui accroissent la fascination qu’on leur porte.
Telles d’autres mythologies abordées à l’école dès le plus jeune âge, ces récits critiquent notre propre société et l’humanité tout entière. À notre image, les déités se trompent, accumulent les erreurs et les catastrophes. À notre image, ils aiment et trompent, souffrent et dépriment, sont passionnés et téméraires.
Thor n’est pas le seul à faire les frais d’une telle vision. Comme lui, Freya change du tout au tout. Hautaine, loin d’être sage, amoureuse de ses bijoux et de tout ce qui se trouve en rapport avec la richesse, elle nous subjugue par ses comportements puérils.
Les personnages donnent ainsi l’impression d’être des caricatures d’eux-mêmes.
Malgré des pouvoirs qui ne sont plus à démontrer, ils restent aussi imparfaits que les humains dont ils ont la garde en Midgard. Et c’est ça qui plaît ! Ils nous font rire, nous exaspèrent ou nous happent, notamment lorsque les batailles épiques ou les quêtes magiques s’ajoutent à la danse.
Une réécriture novatrice et familière
L’auteur nous raconte ce que les ouvrages L’Edda poétique ou L’Edda, récits de mythologie nordique décrivent déjà. Cependant, Neil Gaiman s’est pris au jeu d’une manière totalement différente. Il nous dévoile les secrets divins d’une façon plus simple et plus succincte, en prenant tout de même le temps de nous expliquer la formation des mondes, les neuf entités autour de l’arbre pilier Yggdrasil, ou encore la création du panthéon que l’on connaît aujourd’hui, celui qui s’étend autour d’Odin.
Avec son écriture accessible, ses synthétisations justes et son goût pour ces mythes, il permet aux novices et aux passionnés de plonger dans ces histoires avec facilité. D’autant plus qu’il ne vient pas perturber la narration par des visions d’un autre temps ou des techniques d’écriture plus modernes : il respecte l'œuvre originale.
Pas de fin moralisatrice
Il n’y a souvent aucune morale ni leçon particulière, au contraire des contes que l’on a l’habitude de lire. Ce sont des récits qui dépeignent la puissance (ou la déchéance) des dieux. Tout simplement. Le lecteur en retirera les enseignements qu’il voudra.
Néanmoins, les histoires s’agrippent à un fil rouge plus ou moins discret : la chute progressive des dieux vers le Ragnarök. Et quelle chute ! La vie et la mort combattent avec rage, les pouvoirs divins ne suffisent pas à endiguer les flots barbares qui envahissent Asgard. Une fin épique, comme on les aime, digne des plus grandes œuvres de fantasy !
Conclusion
L’auteur offre ici un livre accessible à ceux qui souhaitent se plonger dans les récits de la mythologie nordique et qui veulent retenir l’essentiel de ces légendes. On ne s’ennuie pas et on apprend à mieux connaître des dieux très médiatisés, mais pourtant méconnus.
Si comme l’auteur, pousser plus loin vos recherches ne vous fait pas peur, plongez dans la lecture plus poussive de L’Edda, un texte davantage complet et difficile à aborder, sur lequel Neil Gaiman s’est appuyé afin d’élaborer ses synthèses jouissives.
Pour une vraie réécriture des mythes nordiques, vous pouvez découvrir le Prélude au Ragnarök, de Fédérico Saggio !
Ou bien, pour quelque chose qui n'a rien a voir, on a une super chronique sur L'intégrale de l'Effondrement, publié aux Bandes Détournées !