Si l'objectif de Kathleen Kennedy et de J.J.Abrams était d'inciter les fans de Star Wars à faire vivre leur univers favori sous formes de théories, aussi farfelues soient-elles, The Force Awakens a réussi son pari. Le film est sur toutes les lèvres, et continue de soulever bien des questions.
Mais à l'heure où les fans s'écharpent sur l'identité du père de Rey (Daisy Ridley) ou le véritable nom de Snoke (Andy Serkis), nous avons décidé de mettre l'accent sur une autre théorie persistante pour ce nouveau volet de Rumeur un Autre Jour, qui s'intéresse au lien qui pourrait être tissé entre The Force Awakens et Rogue One, premier spin-off filmique de la saga Star Wars.
Attention : cet article contient des spoilers sur The Force Awakens
Si cet avis n'engage que moi, l'identité du père de Rey est assez limpide. Le film de J.J.Abrams regorge en effet d'indices désignant Luke Skywalker comme le géniteur de la future héroïne de la postlogie. Le plus évident d'entre-eux restant la ressemblance de l'actrice Daisy Ridley à ses consœurs Natalie Portman et Carrie Fisher. Aussi la question est-elle sans doute une nouvelle filouterie d'Abrams, qui entend nous diviser sur la paternité du personnage quand la question la plus intéressante est en fait l'identité de la mère de Rey, ou encore du vilain principal de sa nouvelle trilogie. Et nous avons depuis quelques temps maintenant une petite idée là-dessus, qui n'a été que renforcée par nos multiples visionnages du septième Star Wars.
La réponse se veut aussi simple qu'efficace : le personnage (au nom inconnu) qu'incarne Felicity Jones dans le spin-off Rogue One, réalisé par Gareth Edwards (Godzilla) n'est autre que la mère de Rey, qui a un temps été, ou est peut-être toujours, la compagne de Luke, mais nous y reviendrons.
Le lien éventuel entre un nouvel épisode numéroté et un spin-off plus expérimental peut paraître surprenant, mais plusieurs indices pourraient aller dans son sens, et ce que nous allons développer ici.
Pourquoi connecter The Force Awakens à Rogue One ?
Une excellente question à laquelle nous pouvons trouver plusieurs réponses, aussi bien artistiques et industrielles. Les deux natures se confondant parfois pour les besoins d'une grosse production, à l'heure où les licences ont plus que jamais la main mise sur Hollywood.
• Ne pas laisser un vide
L'idée serait tout simplement de donner une réponse. Revenons brièvement sur l'idée d'un père pour Rey. Le nombre de théories déversées sur le web vous le prouvent bien : ce mystère passionne, et pour une bonne raison. The Force Awakens nous donne assez d'indices sans toutefois nous assommer d'une réponse nette. Résultat, les fans élaborent bien des histoires sur le sujet. Et elles ont toutes quelque chose en commun : elles seront infirmées ou confirmées par les prochains films Star Wars. Il en effet évident, pour une saga fondée sur le lien du père à l'enfant, de répondre à la question de la paternité. Seulement, cette question en appelle une autre : si Luke est le père, qui est la mère ?
Disney pourrait choisir de ne pas répondre à cette question. Après tout, l'univers Star Wars est aussi fondé sur des mystères. Prenons, par exemple, la fameuse création d'une armée de clones - l'un des événements marquants de la prélogie, vous en conviendrez - que George Lucas avait justifié par les actes d'un Jedi qu'on ne rencontre pas dans les films Star Wars, et dont la présence se limite à un unique dialogue : Sifo-Dyas. Ce genre d'explications hâtives, si elles n'empêchent pas la prélogie de fonctionner, laissent un vide qui risque d'être compliqué à gérer pour Lucasfilm. A l'heure où les fans de la première heure sont à nouveau conquis par Star Wars, on imagine mal l'entreprise laisser vierge cet espace clé dans la vie de Luke (et par extension celle de Rey) Skywalker. Et puisque Hollywood est aujourd'hui dirigé par l'envie de toute expliquer, il y a fort à parier sur une vraie révélation, qui pourrait être belle, avec suffisamment de subtilité et d'impact.
• S'économiser
Et cette subtilité, Disney la stocke peut-être déjà en ayant commandé un spin-off Star Wars entre deux épisodes numérotés qui tourneront visiblement autour de l'identité de Rey. Dans un miroir avec l'Empire Contre-Attaque, on imagine d'ailleurs que Rian Johnson nous en dira plus sur le personnage féminin et ses liens familiaux avec d'autres protagonistes de la saga. Mais il risque d'être difficile, même pour le scénariste de Looper, de jongler avec ces deux mystères (le père et la mère, si vous suiviez bien). C'est pourquoi extraire une partie de ce mystère dans un second film pourrait être salutaire.
En partageant cette révélation entre deux films, Disney se libère d'une scène d'exposition bien lourde, en plus de lier deux de ses nouvelles productions Star Wars. Qui d'ailleurs, tourneront toujours mieux avec une pièce du puzzle chacun que le puzzle entier sur leur dos. Et si jamais Rogue One veut nous présenter les aventures de la mère de Rey, comme nous le pensons, le film a pour lui une époque (entre les épisodes III et IV) où l'on sait que Luke n'a pas encore quitté Tatooine. Résultat, le personnage de Felicity Jones vivra par lui-même, et à l'aide de quelques indices, ce sera à nous d'assembler les pièces du puzzle imaginé par Disney (plutôt qu'à ses deux films de le construire devant nos yeux) pour comprendre qui est la mère Rey. L'idée peut-être intéressante, à la fois d'un point de vue artistique (la révélation au passé plutôt qu'au présent) et d'un point de vue industriel (Disney a sans doute très envie de jouer la carte de l'univers partagé).
• Légitimité
Et si une telle formule aurait, à mon sens, le mérite d'avoir plus d'impact qu'une simple scène d'exposition comme il en existe déjà des tas, elle est aussi un excellent outil marketing. On ne connaît pas encore tout à fait la position de Lucasfilm sur ces spin-offs (si ce n'est que Kenendy ne les voit pas comme des préquelles) et l'entreprise doit donc se demander si le public la suivra sur Rogue One. Tisser des liens entre le spin-off et un épisode dont la légitimité est indiscutable est donc l'occasion pour Disney et Lucasfilm de soutenir leur projet. Ce qui n'est pas forcément synonyme de marketing putassier. Après tout, si le public réagit positivement à Rogue One, on peut imaginer que cela encouragera le studio à proposer des pitchs plus intéressant sur Star Wars.
• Créer un liant
La face artistique de cette décision marketing serait ainsi la création d'un liant pour l'univers Star Wars, avec des aller-retours dans sa chronologie, mais qui seront toujours justifiés par un lien émotionnel, osons le terme, un lien familial, entre le spectateur et les personnages. Il nous arrive ainsi de comparer cette théorie à la position de Peggy Carter (Hayley Atwell) dans le Marvel Cinematic Universe : le personnage évolue dans différentes époques, dans différents rôles, et ainsi, nous permet de prendre nos repères dans des situations parfois très opposées. Celle d'Agent Carter ou de The Winter Soldier par exemple. Maintenant, comme le rappelle Kathleen Kennedy, Marvel penche du côté des personnages, quand Star Wars est un univers complet. C'est pourquoi la saga n'aurait pas à faire apparaître Felicity Jones partout pour nous faire comprendre ses liens avec d'autres personnages. C'est son existence dans cet univers qui comble les blancs dans les destins nos héros.
Quelles sont les preuves ?
Maintenant que nous avons expliqué en quoi cette théorie pourrait s'avérer vraie, il convient de lister les indices qui vont dans son sens. Ils sont plus ou moins légitimes, du simple constat à la comparaison tirée par les cheveux (littéralement, vous allez comprendre) en passant par les déclarations des acteurs.
• Ressemblance physique : rien n'est laissé au hasard dans Star Wars. Et surtout pas les ressemblances physiques, que recherchait déjà George Lucas pour son jeune Anakin Skywalker à l'époque de La Menace Fantôme, comme le montre le making-of du film. A ce titre, on peut s'égarer dans la comparaison, et considérer que Felicity Jones et Daisy Ridley se ressemblent. Toutes les deux britanniques, elles perpétuent l'apparence des autres héroïnes de la saga que sont Padmé et Leia. Choisir une actrice avec un physique ou un look radicalement éloigné de cette forme de"tradition" aurait pu être le contre-argument ultime, mais force est de constater que le visage de Felicity Jones aurait tout à fait sa place dans l'arbre généalogique des Skywalker, comme vous le verrez en galerie.
• Une Mara Jade réinterprétée : C'était déjà mon point de vue avant The Force Awakens et il est plus solide que jamais depuis le 16 décembre dernier : l'univers étendu de Star Wars n'a pas disparu, il a juste été réinventé. À ce titre, Mara Jade, épouse de Luke le canon Legends, pourrait faire son retour dans celui de Disney, sous les traits d'une héroïne légèrement différente (par le nom déjà), mais suffisamment proche de son inspiration pour nous mettre la puce à l'oreille. Comme le sont Rey et Kylo Ren/Ben Solo, par exemple, alors qu'on sait que le scénario de l'épisode VII de Michael Arndt prévoyait carrément d'inclure certains personnages inventés par Timothy Zahn. Aussi, les cheveux rouges de l'actrice ou encore sa relation avec l'Empire - par son père, comme le veulent les rumeurs - vont-ils dans le sens d'une Mara Jade 2.0.
• Daisy Ridley a visité le tournage de Rogue One : comme John Boyega, Daisy Ridley a pu visiter le tournage de Rogue One avant que nous découvrions une seconde image du film de Gareth Edwards. Il y a sans doute une bonne raison, au-delà de l'aspect licence de la chose, pour que les deux héros de notre histoire visitent le plateau du spin-off. Ce pourrait être l'indice ultime quant à l'existence d'un lien tangible entre les deux films. Ridley évoquait d'ailleurs sa rencontre avec Jones en des termes élogieux : "J'adore Felicity Jones. C'était marrant, puisque j'ai été sur le tournage de Rogue One et je lui disais 'Oh mon dieu, je t'adore !'. Elle est si mignonne, élégante et modeste !". L'amour d'une fille envers sa mère ? On attendra pour vous le dire.
• Les spin-offs et les films Star Wars se répondent déjà : outre Rogue One, nous découvrirons, en 2018, une histoire d'Han Solo au sein de la gamme "Anthology" de Lucasfilm. Le scénariste de ce spin-off consacré au contrebandier, Lawrence Kasdan, décrit d'ailleurs le film en ces termes : "Je pense que nous présenterons notre personnage tel qu'il était 10 ans avant un Nouvel Espoir, peut-être un peu avant. Nous n'aurons qu'une petite tranche de sa vie. Kurosawa a un jour dit que les héros sont ceux qui peuvent évoluer, alors que les vilains sont figés et pétrifiés dans ce qu'ils sont, et justement, dans The Force Awakens, Harrison Ford incarne quelqu'un qui ne sait toujours pas qui il est". Ce qui semble aller dans le sens d'un lien entre les films numérotés et leurs spin-offs, qui en qualité de "tranches de vie", pourraient ajouter beaucoup à l'univers Star Wars.
• L'âge de Luke : Felicity Jones est âgée de trente-deux ans mais fait incontestablement partie de ces actrices au visage intemporel. Qu'elle aie la vingtaine ou la trentaine dans Rogue One (qui se déroule juste avant Un Nouvel Espoir), elle ne sera jamais loin des 19 de Luke dans le premier Star Wars. Un âge et un parcours assez similaires (si on en croit les rumeurs, Jones incarnera une rebelle) qui pourraient amener les deux personnages à se rencontrer. Non pas au sein de la trilogie originale, mais peut-être après la Bataille d'Endor, au moment où Luke choisit de refonder l'ordre Jedi ou de se désintéresser de la politique galactique, par exemple. Quant à ceux qui prétendent que les Jedi n'ont pas le droit de s'unir, nous répondons que Luke fait bien ce qu'il veut à partir du moment où il est le dernier d'entre eux.
Le fin mot de l'histoire
Artistiquement et industriellement parlant, Disney aurait un joli coup à jouer avec cet éventuel lien familial, qui n'est jamais que le nerf de la guerre de l'univers Star Wars. Et s'il est possible que cette théorie s'avère vraie dès le 14 décembre prochain dans les salles, elle pourrait également s'avérer très maladroite. Mais avec un peu de jugeote et une bonne dose de subtilité, Star Wars pourrait ici proposer une vraie expérience de cinéma.
Personnellement, je serais ravi de trouver, en filigrane de Rogue One, le maillon manquant de la chaîne des Skywalker, qui n'empêcherait pas l'aventure de Felicity Jones d'être épique et prenante. Toute l'idée est là : donner au spectateur les moyens de transcender son expérience de visionnage en connectant lui-même les éléments d'un univers vaste, et plus vivace que jamais.