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Critique - Le sentiment du fer (Jean-Philippe Jaworski) : Retour dans le vieux royaume

Par Baalooos - Charles-Edouard
5 min 16 juin 2022
Critique - Le sentiment du fer (Jean-Philippe Jaworski) : Retour dans le vieux royaume
On a aimé
- On approfondit l'histoire du Vieux Royaume
- Quelques très bonnes nouvelles
On n'a pas aimé
- Trop court
- Toutes les nouvelles ne sont pas égales

Le Sentiment du fer chez Folio SF est une réédition d’un recueil de 5 nouvelles parues pour la première fois aux éditions Hélios en 2015. Cet ouvrage s’ouvre par un avant-propos de l’auteur qui nous donne du contexte sur ces récits et leurs parutions avant de nous plonger à nouveau dans son univers à l’époque de la guerre des Grands Vassaux. On va découvrir le Vieux Royaume, de Ciudalia au Royaume de Léomance aux côtés d’humains, d’elfes et même de nains.

 

La première nouvelle, Le sentiment du fer, qui donne son nom à ce recueil comblera les fans de « Gagner la guerre », on y suit en effet un maître assassin chargé d’une tâche de monte en l’air, volé un livre. L’écriture est plaisante, rythmée et l’on y retrouve toute l’énergie nous ayant fait aimer Benvenuto Gesufal, un peu trop peut-être et il manque une véritable surprise pour être vraiment comblé.

Doré de lumière, poudré par la poussière remontée de la chaussée, le palais Rapazzoni se guindait au-dessus de la place.

La seconde nouvelle, probablement la meilleure de cet ouvrage se nomme L’elfe et les égorgeurs. On y suit un trouvère elfe visitant un château dévasté, dans lequel traîne une bande de soudards prêts à en découdre. Dans ce court récit, c’est le rythme et la différence de niveau de langue entre d’un côté un elfe, troubadour qui plus est, raffiné et sachant manier la langue, de l’autre des routiers, ivres de meurtres et de boissons parlant un langage grossier et rugueux. Cette dichotomie donne une forme légère et teintée d’humour à un texte sur fond de guerre et de désolation.

La troisième nouvelle, Profanation, narre le procès d’un meunier soupçonné de détrousser des cadavres sur les champs de bataille. Devant ses juges, des disciples du Desséché, il va multiplier les mensonges et la mauvaise foi pour essayer de s’en sortir devant un auditoire s’impatientant devant les pitreries du plaignant. Cette histoire, très cocasse et pleine de rebondissement nous montre le fonctionnement du train de civil suivant une armée et de comment chacun fait ce qu’il peut pour s’en sortir. En creux on va aussi en apprendre plus sur le culte du Desséché et sur les moyens qu’il est prêt à mettre en œuvre pour gagner la guerre.

Ce tribunal étant formé d'hommes de foi, respectueux des droits des personnes, y compris des plus odieux criminels, nous ne vous soumettrons point à la question.

La quatrième nouvelle, Désolation, est un hommage complètement assumé à la Moria de Tolkien. On y suit une bande de nains, accompagnés de gnomes et d’ânes, tentant de s’infiltrer dans la tanière d’un dragon sans se faire prendre tout en étant poursuivi par une armée de gobelins prêts à en découdre. On y retrouve tous les standards de la fantasy, les nains sont bourrus, lents et endurants, les gnomes sont peureux, serviles et malins, les gobelins quant à eux sont nombreux. On retrouve tout de même la patte de l’auteur dans les discours et encore une fois on prend beaucoup de plaisir à comparer l’élocution des nains, fiers et féroces combattants à celle des gnomes, serviteurs zélés mais craintifs. Enfin, le twist final est une vraie surprise qui montre encore une fois la cruauté du monde inventé par Jaworski.

L'explosion a réveillé la montagne : l'onde de choc a dû faire céder un sérac, au sommet des falaises.

La dernière nouvelle, La troisième hypostase, nous en apprend plus sur le fonctionnement de la magie, notamment elfique, dans le Vieux Royaume. On y suit Lusinga, enchanteresse humaine initiée par un archimage elfe qui va devoir faire face à une menace inconnue tout en s’inquiétant pour ses compagnons en train de combattre les disciples du Desséché dans une guerre lointaine. Cette nouvelle tragique est pleine de poésie et de mélancolie, on y retrouve là aussi un arrière-goût de Tolkien avec les elfes détachés du monde décidant de rentrer dans leurs pénates plutôt que de rester et de combattre le mal.

Ce recueil de nouvelles, bien que court, permet à l’auteur de développer encore son Vieux Royaume en nous présentant de nouvelles races, de nouveaux lieux pour notre plus grand plaisir de lecteur !

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