1.
| Pour avoir la tête dans les étoiles
Romain Benassaya et ses huis-clos dans l’espace
Si vous voulez du page-turner allié à un style vif et d’une clarté exceptionnelle, fermez les yeux et embarquer à bord des vaisseaux imaginés par Romain Benassaya. Que cela soit avec Pyramides (lu et approuvé il y a quelques années), Arca ou encore le récent Les Naufragés de Velloa, vous trouverez votre compte.
Si vous recherchez ce qui peut advenir d’une petite communauté humaine confrontée à l’isolement d’un vaisseau ou d’une mégastructure alien, regardez du côté d’Arca et de Pyramides. Arca traitera davantage de la question religieuse et du fanatisme de certains dans un espace vide de toute vie extérieure. Tandis que Pyramides s’attache à nouer et dénouer les relations humaines (familiales, amicales, professionnelles) pour mettre en exergue toutes les subtilités des jeux d’alliance et de factions. Le tout au cœur du vide et de l’espace. Vide ? Pas si sûr…
Les Naufragés de Velloa s’amorce par un mystère : un vaisseau humain de technologie archaïque est retrouvé au-delà du système solaire, orbitant autour d’une planète habitable. Cette fois, l’auteur conserve les conflits factionnels en y instillant une technologie alien mystérieuse, qui, plus on la découvre, est fascinante et terrifiante à la fois. De plus, il imagine une communauté où la consanguinité est un risque plus que réel du fait d’un trop petit nombre de citoyens et nous montre ce que l’humanité est prête à faire pour survivre…
Il me tarde de lire La Dernière Arche, son dernier chez Critic et qui se déroule dans le même univers que Pyramides !
Si vous misez sur Benassaya cette année, prenez-en deux tout de suite sur la plage : ce sont de beaux bébés en termes de pages mais ils se lisent à une vitesse folle ! Ce n’est par hasard si Syfantasy l’a placé parmi les nouvelles voix de la SF française à suivre ABSOLUMENT !
Emilie Querbalec et Quitter les Monts d’Automne pour une science-fiction aux touches japonaises
Véritable révélation du début d’année, Emilie Querbalec nous a offert, avec son deuxième roman, un vrai voyage dans un Japon fantasmée, le tout saupoudré de voyages spatiaux et de quête d’identité. En suivant les traces de Kaori sur une planète entièrement inspirée de la culture asiatique, on se met à vibrer avec cette jeune danseuse alourdie par le secret de l’écriture dans un monde où l’oralité prime ! Dans cet univers le moyenâgeux côtoie vaisseaux et robots, tout d’abord par petites touches avant que le lecteur toute la profondeur de l’univers d’Emilie Querbalec.
Quitter les monts d’Automne est à la fois dépaysant (bien que la fantasy asiatique commence à se tailler une place dans notre imaginaire francophone) mais aussi profondément touchant car on se prend à aimer et détester ce personnage, ce qui en fait un véritable héros de littérature : pétri de contradictions, d’actes courageux mais aussi d’imbécilités profondément humaines !
Pour notre avis plus complet sur l’œuvre, c’est par ici !
2.
| Pour sentir le soleil sur votre peau
Bradley P. Beaulieu et les Douze Rois de Sharakhaï pour un désert qui vit et vibre
Sharakhaï est un de ces romans qui fascinent. Pour celui qui a vu Kingdom of Heaven ou qui a visité le Moyen-Orient, on y ressent le souffle du désert, la morsure du soleil, les senteurs du marché aux épices…
Çeda est une héroïne comme on les aime. Elle cherche à venger la mort de sa mère, exécutée par l’un des Douze rois de Sharakhaï, des rois immortels aux pouvoirs mystérieux. Elle est gladiatrice, messagère, monte-en-l’air, rebelle... Avec une personnalité bien trempée et des nerfs d’acier, elle semble être prête à tout mais au fil de la lecture on découvre un passé touchant et très dur. Bradley P. Beaulieu réussit à dépeindre une héroïne très humaine à cause de son histoire troublante et mouvementée ; histoire qui n’a eu de cesse de l’endurcir, mais qui ne lui a pas fait perdre sa générosité – marque culturelle de cette ambiance moyenne-orientale.
Le cycle de Sharakhaï a cette force de réunir tant d’idées en une belle histoire : une héroïne touchante et généreuse, une vengeance, une rébellion, des complots qui ne font que monter en complexité et surtout une ville vivante que l’on rêverait de visiter.
Victor Fleury et la Croisade Eternelle pour des mythes et une Mésopotamie qui prend vie
Si vous lisez assez régulièrement les articles du site, vous aurez compris qu’on adore Victor Fleury. Pourquoi ? Parce que c’est un auteur qui ose ! Après avoir fait ses armes avec un univers Steampunk dans un Empire napoléonien dominant le monde grâce à l’électricité, il s’est attaqué à la fantasy mésopotamienne !
Sur les traces de Nisaba, une jeune prêtresse-esclave, dont on a retiré la garde de son enfant, et qui est au service d’un prince arrogant et souvent (trop) drogué, on découvre un univers vaste et extrêmement bien écrit. Comme à l’Antiquité, les Hommes croient dur comme fer aux mythes et c’est là que la fantasy intervient : la magie existe et les dieux répondent aux prières de leurs fidèles. Et justement, des Elus des dieux se sont taillés un empire qui n’a de cesse de repousser ses frontières à travers à une guerre sainte plurimillénaire.
A travers les yeux de Nisaba, forcée de suivre son maître, Victor Fleury nous fait découvrir la culture mystérieuse de la Mésopotamie ancienne, avec ses merveilles, ses ziggurats et ses divinités cruelles… Mais aussi les cultures dominées par cet empire qui se dit divin. Au même titre que Sharakhaï, cette trilogie (dont le dernier tome sortira en fin d’année) nous transporte dans un ailleurs grâce à un style qui se nourrit de détails : vêtements, ambiance sur les marchés, processions religieuses dans les rues…
Victor Fleury est clairement un auteur à suivre pour ses textes aux univers audacieux et très ambitieux ! Ce n’est pas un hasard s’il est présent dans notre dossier sur les nouvelles voix de la fantasy française à suivre !
Pour notre avis plus complet sur l’œuvre, c’est par ici !
3.
| Pour rire au bord de la piscine
L’indémodable Terry Pratchett et les Annales du Disque-Monde
Chaque été, je ne peux m’empêcher de m’offrir un des romans des Annales du Disque-Monde. Dans un univers « troll » de fantasy, les tocards magnifiques sont nos nouveaux héros. Les aventures se déroulent donc sur un Disque-Monde gigantesque, juché sur le dos de 4 éléphants, eux-mêmes juchés sur une tortue cosmique ! Maintenant que les bases sont posées, que dire de cette saga-univers tout simplement géniale ?
Je ne peux que vous recommander de commencer par le cycle de la Huitième couleur pour être aux côtés du mage Rincevent et du premier touriste du Disque, Deuxfleurs, qui vont vous donner un aperçu de la cité craignos et fabuleuse d’Ankh-Morpok et nous révéler tous les petits clins d’œil glissés par l’auteur (qui s’inspire de Lovecraft, du Seigneur des Anneaux, du trope de l’Elu, de celui du barbare un peu rustre…).
La lecture de Terry Pratchett est toujours rafraîchissante et vous détendra à coup sûr, tout en vous faisant réfléchir sur des sujets sérieux comme la destinée, la place des femmes, celle de l’argent ou encore de la vieillesse, mais toujours avec un humour british et un peu (beaucoup) burlesque !
Le petit nouveau Yann Bécu et Les Bras de Morphée
Les Bras de Morphée est un véritable ovni. En imaginant un monde où presque tout le monde dort entre 15 et 20 heures, l’auteur nous offre une belle anticipation pleine d’humour. Yann Bécu a inventé un monde qui va à l’essentiel : finis la politesse, relations à distance, dissertations de 12 pages. Tout doit être synthétique et court-termiste sinon le sommeil vous rattrapera dans tous les cas.
Les Eveillés, les nouveaux riches (de temps), dorment (seulement !) 12h, ce qui les rend oisif au possible. Pascal Frimousse, le « héros », est l’un d’eux. Mais comme il est professeur de français et que plus personne n’a le temps de lire Les Misérables et autres pavés en tout genre, il s’est reconverti comme troll à temps partiel : il fait perdre du temps aux autres, le tout pour de belles sommes bien rondelettes !
Dans notre critique, on avait soulevé le fait que le roman n’avait pas de réel fil rouge très marqué mais pour une lecture détente au bord de l’eau ce n’est pas grave ! Au contraire, les moments burlesques et très savoureux dans une Prague endormie vous feront mourir de rire, pina colada à la main !
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4.
| Pour des récits passionnants
Calame de Paul Beorn pour le point de vue de la lieutenante d’un chef de guerre pacifiste !
Paul Beorn est indéniablement une plume à suivre car à chacune de ses parutions, on sent un style plus affirmé et plus beau encore. Il avait fait sensation avec le Septième Guerrier-Mage aux Imaginales mais avec Calame il a frappé fort. Cette fois, en ne prenant pas le point de vue du héros de l’Histoire avec un grand H mais de son second, en l’occurrence sa seconde, il nous propose comme le Nom du Vent de détricoter la légende d’un chef de guerre qui a fait trembler le royaume car il voulait lutter contre une loi mettant les femmes à la merci des hommes.
En plus de traiter d’un sujet de société actuel, avec notamment la place des femmes qui est remise en cause dans certains pays de notre monde, Paul Beorn nous offre un univers de fantasy bien ficelé, sans fioritures et uniquement tourné vers l’action. Chaque chapitre est là pour servir l’histoire de Darren Dahl et de Maura, sa seconde (et sa fille dont il ignore l’identité), qui est rapportée à un vieil conteur qui ne sait pas mentir.
On se prend d’affection pour ce géant qu’est Darren Dahl, meurtri par les batailles qu’il a vécues et qui a perdu son grand amour et qui n’aura de cesse de lutter pour sa survie et les femmes de son village. Tandis que Maura prendra une place véritablement clé dans l’histoire, ajoutant une touche d’humanité dans sa légende. Cette saga en deux tomes est une vraie pépite, en plus de proposer un système de magie simple mais ô combien original (mais le révéler ici vous gâcherez le plaisir car la magie est au cœur de l’intrigue !)
Pour notre avis plus complet sur le tome 1, c’est par ici !
L’Empire du Silence de Christopher Ruocchio pour le point de vue d’un gosse de riche devenu sans-abri, gladiateur, Champion de l’Empire et enfin traître !
Les amateurs de Science-fiction y trouveront leur compte avec le cycle du Dévoreur de Soleil qui se veut hybride entre fantasy et SF. Hommage à Dune et à Gladiator dans son premier tome, Christopher Ruocchio propose le récit d’un traître âgé de mille ans, Hadrian Marlowe, et qui semble avoir vécu mille vies avant de trahir l’Empire galactique et regretter la guerre qu’il mena contre une race alien… Mais tout commence par un gosse de riche frustré par les responsabilités qu’on cherche à lui imposer et qui s’enfuit pour échouer sur une planète aux marges de l’Empire. Condamné à survivre loin des radars de la noblesse et de la Fondation, l’ordre religieux fanatique qui impose sa foi, il sera tantôt sans-abri puis gladiateur.
Chacune de ses vies l’amène à se forger une personnalité et un mental d’acier qui sauront lui être utile dans de très nombreuses situations. Mêlant action et intrigues politico-religieuses, le Dévoreur de Soleil est un bel hybride de Space-opera, d’heroic fantasy et de World-building !
Le point de vue à la première personne est toujours une prise de risque car il faut s’attacher au personnage principal, sinon on lâche rapidement une histoire. L’auteur arrive à nous capter par son univers et le réalisme du personnage d’Hadrian qui est loin d’être une Mary Sue à qui tout réussi sans des conséquences sur son entourage.
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Un Long Voyage de Claire Duvivier pour le point de vue du secrétaire d’une des femmes les plus influentes de l’Empire !
Claire Duvivier nous propose une fantasy douce et onirique comme on en voit rarement. A travers les yeux de Liesse, on va découvrir un univers riche au cours de son voyage à travers l’Empire qui l’a recueilli et qu’il va servir aux côtés de Malvine Zelina de Félarasie, gouverneure et ambassadrice.
Liesse sera un voyageur. Au soir de sa vie, il conte à sa femme son destin incroyable et va nous proposer des cultures et des accents chantants, sublimés par un style sobre et clair. Un Long Voyage est un récit calme à privilégier quand la langueur de la plage vous prendra. Et soudainement, des explosions de violence surgiront et vous toucheront durement car vous vous attacherez aux deux protagonistes. Un Long Voyage est un de nos coups de cœur de cette année car il offre aux amateurs de fantasy un récit touchant avec une réelle progression des personnages, ballotés par les mouvements de la vie et de l’administration d’un empire mourant.
Une vraie pépite.
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Derniers jours d’un monde oublié de Chris Vuklisevic pour le point de vue de trois personnages très marqués suite à la découverte d’un (nouveau ?) continent !
Rares sont les récits choraux (à plusieurs voix donc) qui savent proposer des personnages d’importance et de qualité égales. Avec son premier roman, Derniers jours d’un monde oublié, Chris Vuklisevic nous propose 3 voix fortes et originales au cœur d’une révolution à l’échelle d’une civilisation. Erika, une pirate, découvre avec son équipage une île inconnue peuplée d’une civilisation ancienne qui était persuadée d’être la dernière représentante du genre humain. Elle apporte le point de vue de l’explorateur, du découvreur : elle est le chamboulement. Et cela, Arthur, le milliardaire, y voit une opportunité, tandis que La Main, chargée des naissances, est apeurée par cette invasion venue de l’extérieur.
Loin de rester dans leurs idées reçues, les personnages vont progressivement se transformer, se glisser dans de nouveaux concepts car la découverte de l’île est inéluctable. La vraie force de l’autrice réside dans sa maîtrise de la progression de ses personnages qui restent toujours en cohérence avec les événements et ne changent pas soudainement de personnalités pour des besoins scénaristiques.
Elle nous propose un univers riche et fouillis qui rappelle un Jack Vance qui ébauche des continents lointains en quelques phrases.
Pour notre avis plus complet sur l’œuvre, c’est par ici !